I – 2234

Dôme Epais le Jasmin

« Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière empoisonnée, Le dernier poisson capturé. Alors visage pâle réalisera que l’argent ne se mange pas. »

Sitting Bull, chef indien Sioux du 19ème siècle.


       Nathan Nash, officier étoilé de l’armée spatiale du corps expéditionnaire se réveilla en sursaut. C’était un beau matin de printemps 2234, une nouvelle journée ensoleillée et fraiche débuta. C’était un homme âgé de 41 ans, mais aussi l’un des plus jeunes haut-gradés parmi ses pairs. Malgré son jeune âge, c’était un homme d’expérience dans son métier, il avait déjà combattu et exercé le commandement d’une flotte avec brio. Il était doté d’un caractère bien trempé même s’il savait rester humble et conciliant. Il avait à sa charge le commandant de la septième flotte de la défense spatiale, son vaisseau-amiral, le Bellérophon était l’un des plus prestigieux bâtiments de guerre de la flotte fédérale.

       Habitant près de Paris, voilà trois mois qu’il était resté chez lui avec sa famille. Aujourd’hui, il devait se rendre au ministère de la défense aérospatiale à Londres. Il devait prendre une navette magnétique. Paris se trouvant être le cœur du réseau ferroviaire magnétique européen. Le trajet par navette automatisé de sa ville de Paris vers Londres ne pris que quinze minutes. Il n’avait que quelques petites minutes à marcher, ils étaient rares ceux qui marchaient. La plupart, bien trop pressés, utilisaient des moyens de locomotions portatifs.

       Puis il monta dans une autre navette automatisée qui cette fois ci qui l’emmena jusqu’au quartier de la New City, restructuré et renommé depuis la montée des eaux. Durant le court trajet, Nash était quelque peu anxieux malgré qu’il sache gérer son stress, il était convoqué par la nouvelle ministre en personne fraîchement nommée il y a quelques mois alors qu’il était encore en mission dans l’espace. Il n’avait pas encore eu l’occasion de la rencontrer, de ce qu’il avait entendu dire, elle avait un parcours de politicienne assez classique. Avant cela, il devait également participer à une réunion du haut conseil de sécurité spatiale, pour laquelle il était le principal intéressé en raison de récents événements lors de sa précédente mission. Cela faisait d’ailleurs l’objet de sa suspension temporaire. Nash craignait le conseil disciplinaire à raison de son futur entretien avec la nouvelle ministre, avec comme conséquence la révocation de l’armée. Il espérait que cela n’arrive pas car l’armée était toute sa vie. Il s’était engagé à seulement 18 ans en tant que mécanicien. Deux années plus tard, durant son service, la guerre coloniale entre la Terre et sa seule colonie, Terra Nova, éclata. Cette guerre s’acheva un an et demi plus tard par une victoire Terrienne et un gouvernement unifié des deux mondes. Nathan intégra alors l’académie militaire après un examen rigoureux et en sortit deux ans après en tant qu’officier tacticien, de là il gravit les échelons un à un jusqu’à devenir vice-amiral. Nathan était plutôt fier de sa carrière militaire.

       Il était neuf heures, la grande tour de Londres sonna, sa navette, ainsi que celles d’autres provenances ouvrirent toutes leurs portes au même moment, tout était si bien synchronisé en cette époque.

       Nathan entra dans l’imposant immeuble ministériel de la défense. Il était inutile pour lui pour s’adresser aux automates d’accueil, il connaissait déjà bien les lieux. Par ailleurs, rares sont ceux qui ont réellement besoin d’eux, où que ce soit. Tout ce petit monde se dirigea alors vers les ascenseurs, curieusement, les plus jeunes et moins gradés prennent ceux de gauche, qui vont le moins haut de cette grande tour et les plus âgés, vers  la droite.     Le tout dans une fluidité et un silence très efficace. Nathan se dirigea ensuite vers son ascenseur en toute tranquillité, ainsi que d’autres arrivants beaucoup plus pressés. Alors que d’autres encore en sortirent en accélérant le pas car ils n’avaient pas de temps à perdre pour leurs navettes. Nathan pensa qu’il n’était pas pressé d’être arrivé afin d’être châtié, que tous ces autres gens étaient pressés d’arriver pour le boulot mais aussi pressés de rentrer à la maison. Nathan détestait cela, l’ambiance malsaine d’une grande métropole où tout devait aller toujours plus vite. Il n’y avait guère de musiques dans l’ascenseur, chacun plongé dans son monde, les fonctionnaires à l’intérieur ne se parlaient pas. Cela était inutile car les portes s’ouvrirent déjà, quelques-uns, les plus jeunes en premier sortirent. L’ascenseur monta encore, très vite, ainsi en quelques petits instants successifs, le petit groupe se réduisit jusqu’à ce que Nathan se retrouva seul, cela ne dura pas car il arriva déjà au dernier étage.

       Il entendit un grand bruit sourd qui vint du toit, il s’agissait sans doute de l’aéronef de la ministre et de sa délégation. Il sortit de l’ascenseur vers le vaste couloir face à lui. Il avança, tête baissée jusqu’à la salle de réunion des personnalités dirigeant la flotte spatiale.

       Il se fit soudainement agrippé le bras par quelqu’un derrière lui.

       -Ah c’est toi ! Tu m’as surpris ! Comment vas-tu ? s’exclama Nathan.

       –Ca va et toi ? Ta famille ?

       –Loumène continue de grandir  et n’aura bientôt plus besoin de son vieux père, elle va sur ses 18 ans ! Quant à Cassandra ça va aussi, elle a toujours un tiers temps dans l’instruction publique. Toujours aux commandes du Pégase pour patrouiller sur Andromède?

       –J’ai toujours ce vieux rafiot! dit-il, d’un air amusé. Les patrouilles passent, je compte bien finir ma carrière là. Comme je suis toujours seul, j’occupe beaucoup de mon temps libre dans les mondes des rêves.

       –Ah ! Le V-World ! Cela fait bien longtemps que je ne me suis pas noyé dedans. Je n’ai pas le temps ni l’envie de m’y perdre, je dois bien admettre que je n’ai plus le temps entre ma famille et le travail. Quand je suis chez moi, je préfère passer du temps avec elles. Même si Loumène passe énormément de temps la dessus.

       Nathan était attristé de voir Loumène se connecter chaque jour au V-World, un monde de rêves. Jeune comme il le fut, il sait qu’elle cherche à fuir la triste réalité de ce monde empreint de cynisme qu’il côtoie lui-même.

       Il aimerait qu’un jour, elle puisse partir pour la seule planète à peu près viable que les hommes ont su découvrir en 2098, Terra Nova. Trouvée suite aux grands progrès dans l’exploration spatiale des hommes. Grandement motivé par un besoin crucial pour l’humanité de trouver un nouvel environnement de survie. La planète Terre étant de plus en plus inhospitalière et manqua de ressources pour sa population, qui finit par se stabiliser à près de neuf milliards d’êtres humains. La fin du 21ème siècle était une période très sombre pour l’humanité, où l’eau, la terre et l’air étaient des valeurs marchandes. Beaucoup trop sollicitées, la faune et la flore n’arrivaient pas à se régénérer suffisamment vite face à l’activité humaine.

       Un siècle plus tard, la grande guerre coloniale dévastatrice éclata, Terra Nova clamant son indépendance. La jeune et ambitieuse civilisation avait subi des bombardements nucléaires l’ayant rendu moins attrayante au cours de cette folie de destruction humaine. Cependant, il eut la chance de visiter ce monde à plusieurs reprises au cours d’escales. Ainsi, il resta persuadé que ce « nouveau » monde, bien que souillée par la guerre, offrait toujours une bien meilleure vie que la veille Terre dévitalisée. Il n’était pas le seul à y penser, c’est pourquoi Terra Nova était onéreuse pour les expatriés Terriens, la rendant inaccessible à beaucoup.

       Daniel reprit la discussion :

       –Pour la réunion, ils comptent parler de ton accrochage avec le Lazare. T’as peut-être manqué l’occasion de l’arrêter, c’est vrai. Comme toujours, c’est la folie quand ces pirates reviennent! Quand j’étais jeune c’était déjà une vraie chasse à la sorcière ce mythe. J’ai servi plusieurs commandants au cours de ma carrière qui était obsédés de le déboulonner, sans jamais avoir eu la chance de le croiser.  Dans tous les cas, je sais que si t’as pas poussé le combat c’est que t’avais de bonnes raisons.

       –Tu as raison, c’était autrefois un fantasme. Mais, aujourd’hui il est une réalité, il est désormais très actif après cette si longue absence. On pensait tous qu’il ne reviendrait jamais depuis la fin de la piraterie.

       La discussion prit fin et les deux amis s’avancèrent vers la salle de réunion et prirent places assises. Tout le gratin de la défense était là, des officiers supérieurs, des hauts fonctionnaires. La séance était présidée par la Ministre, Claire Swan, qui fit une entrée remarqué par une autre porte derrière son grand fauteuil assigné, tout de cuir. Tous, se levèrent par respect, question de bien séance.

       Ainsi la réunion commença par un résumé de la situation du chef d’état-major. Concernant le vaisseau de guerre pirate le Lazare, qui arpentait les traditionnelles routes commerciales entre la Terre et Terra Nova pour piller. C’était il y a près de quatre-vingts ans, comme tous les pirates de l’époque. Plus récemment, Lazare était repéré en train de  naviguer pour piller sur d’autres voies commerciales entre les hommes et leurs alliés lointains, les sidoniens.

       Ces derniers étaient entrés en contact avec les hommes il y a neuf années maintenant, c’était une civilisation pacifique. Très vite un traité de paix et de délimitations territoriales spatiales ont étés mises en place, avec toutefois des dérogations pour les vaisseaux marchands escortés de bâtiments militaires pour les échanges commerciaux. Ce sont des êtres dont la ressemblance avec les humains est frappante. Ce qui choque le plus quand on les rencontre pour la première fois, c’était leurs teints de peau très pâle, tel un mort. Ceci dit, c’était aussi cette ressemblance avec les hommes et leur capacité d’apprentissage rapide de communiquer dans le langage humain qui ont fait d’eux, de précieux alliés.

       Ce que l’on sait d’eux c’est qu’ils ont une planète, appelé par eux-mêmes « La Verrière». Assez inhospitalière car il y fait froid, le soleil en est éloigné et elle n’est pas vraiment propice au développement de la vie. Au final, ils n’y possèdent qu’une importante base militaire là-bas. Cependant il semble mieux résister que l’homme aux conditions rudes. Ils ont expliqués avoir une planète mère appelée simplement Sidonie, mais ils refusent de fournir sa localisation précise en raison d’expériences passées désagréables. Cela n’avait pas manqué d’effrayer le gouvernement fédérale de l’époque, mais les sidoniens se sont voulus rassurants en expliquant avoir éradiqué la menace, voilà les hommes avertis. Ils ont une puissance militaire spatiale semblable à celle des hommes, le même style de vaisseaux, une technologie similaire exceptée dans sa forme évidement. Ils ont assurés qu’en dehors de la menace d’un peuple belliqueux qu’ils ont connu il y a longtemps, ils ne connaissent plus personne d’autre dans l’univers. Et enfin ils disent ne pas avoir dans leur répertoire cartographique de l’univers, une planète que l’homme pourrait coloniser, après tout c’est normal, ces dernières sont extrêmement rares et la vie s’y développe très vite. 

       Le chef d’état-major en vint aux faits. Le vaisseau pirate Lazare était réapparu en même temps que cette alliance. Il était nuisible aux relations diplomatiques entre nos deux civilisations. Il était le dernier vaisseau pirate de guerre encore actif, le plus vieux et surtout le plus puissant. Il attaquait essentiellement les convois sidoniens. Lazare attaque sans prévenir et sans quartiers, surement intéressé par leurs cargaisons très précieuses et inédites. Il a une puissance de feu suffisante pour tenir tête sans difficultés à deux ou trois croiseurs sidoniens.

       Ca fût dans ces conditions que l’amiral Nash, commandant du Bellérophon était intervenu. Il a vaillamment combattu le bâtiment pirate permettant aux sidoniens de s’enfuir, désabusés par un feu nourri du Lazare sur le point de les achever. Pendant la bataille, les deux croiseurs avaient souffert. Ainsi, l’amiral avait préféré abandonner le combat et laisser fuir le Lazare, plutôt que de persévérer.

       Il fut reprocher à Nathan, de ne pas avoir persévérer justement. De ne pas avoir fait usage de l’arme expérimentale unique et potentiellement destructrice de son vaisseau, l’Aegis.

       Aujourd’hui encore, pendant toute la réunion les remarques à l’encontre du vétéran allaient bon train. Un officier s’écria :

       –Vous n’auriez pas dû cesser le feu ! Vous imaginez les conséquences de votre laxisme ? Il en découle de nos échanges fructueux avec les sidoniens, si ces derniers rompent leurs accords ? Ou pire encore s’ils imaginent que cela vient de nous ?! 

       Défendant son ami, Daniel reprit :   

       –Allons, du calme ! L’amiral Nash a sauvé deux croiseurs sidoniens et préserver la cargaison, ce n’est pas l’échec dans l’absolu !

       –Ecoutez messieurs ! Je sais que j’ai probablement failli à le neutraliser, j’aurai pu prendre le risque d’utiliser l’Aegis et de m’acharner en combat à mort. Mais, il m’était difficile d’évaluer la capacité de combat du Lazare par rapport à la mienne. Bien que les sidoniens ont eu plus de pertes que nous dans cet effort de guerre. J’ai d’abord pensé aux membres de mon équipage sachant que notre mission de maintien de sécurité était accomplie. Je vous rappelle qu’il est du devoir d’un officier commandant de garantir la survie de ses hommes, et d’estimer s’il est nécessaire ou non d’aller jusqu’au sacrifice, or ce n’était pas le cas, ça n’en valait pas la peine !

       Enchérit Nathan sur un ton exaspéré.

Un autre officier demanda au directeur du corps d’enquête technique :

       –Qu’avons-nous comme informations concernant le Lazare ? Il est dans nos registres et présent dans de nombreux rapports de combats depuis 2150. Au moment de l’expansion coloniale de Terra Nova. Qui le commande ? Quel équipage le compose ? Son vaisseau semble de conception humaine.

       –A vrai dire l’ère de la piraterie n’a jamais vraiment pu décoller, il a existé mais fut rapidement maîtrisée grâce à notre rapidité d’intervention. Cela fait des années que nos services enquêtent au sujet du Lazare. Seulement, il n’existe rien dans les registres des chantiers aérospatiales concernant ce vaisseau, ni en vaisseau militaire de notre conception déclarées perdues. De toute façon, il ne ressemble à rien de ce que nous avions construit en civil ou militaire. Concernant les individus à son bord depuis tout ce temps, il en est de même, répondit le directeur.

       La ministre sembla nerveuse et serra discrètement ses mains.

       -Peut-on envisager l’origine extraterrestre ? Demanda un autre officier.

       -C’est envisageable, répondit le directeur.  

       -Les sidoniens savent-ils quelque chose à ce sujet ?

       -Visiblement, non. Nous avons même envisagé l’hypothèse que Lazare était un vaisseau sidonien envoyé en reconnaissance depuis tout ce temps pour tester notre défense. Nous avons écarté cette hypothèse quand il a anéanti plusieurs croiseurs sidoniens faisant de nombreuses victimes. Ils avaient embarqué avec des officiers humains qui les ont vus mourir pendant la bataille. Il semblerait que le Lazare soit plus clément avec les vaisseaux fédéraux, du moins ceux qui ne s’obstinent pas contre lui. Dans la mesure où nous avons aussi essuyé nos pertes, les sidoniens croient en nôtre bonne foi. Ainsi qu’aux actes de pirateries hors de notre contrôle. Bien qu’ils soient convaincus que l’équipage est humain et que nous sommes incompétents à gérer cette affaire, conclu-t-il.

       Le débat continua quelques temps mais sembla toucher à sa fin. Nathan regarda la ministre Swan afin d’essayer de deviner ses pensées. Mais cette dernière savait rester stoïque et impassible aux interrogations à son sujet, elle se contenta de réguler le débat. Malgré tout, elle finit par jeter un œil attentif à son subordonné, à peine perceptible. Les délibérations s’achevèrent mais restèrent très vives et infructueuses.

       Il était donc temps pour les chefs militaires de présenter leurs prérogatives. Certains continuaient de chuchoter discrètement d’une oreille à l’autre. D’autres gribouillaient leurs tablettes holographiques portant sur leurs dispositifs, déjà pré-remplies et faisant valoir leurs nouvelles commodités de mission afin d’envisager de stopper les exactions du vaisseau pirate. Il s’agissait essentiellement de réaffecter des groupes de combats ainsi que divers moyens supplémentaires de lutte contre les pirates du Lazare. Ces dispositifs d’organisations étaient signés par la ministre et seront mis en œuvre par ses officiers.  Elle apposa son puissant cachet numérique ministériel à différents documents, rejetant d’autres, au gré de ce qui lui sembla correct.

       Nathan sembla pourtant n’y remarquer aucune conviction, ni de réelles déterminations concernant ce vaisseau pirate. Elle resta un mystère pour lui, qui se fia beaucoup à son intuition. Il n’avait d’ailleurs rien à lui faire signer, étant toujours en attente des suites de sa suspension provisoire. Un à un les chefs sortirent de la salle de réunion, regagnant leurs foyers ou leurs navettes pour ceux encore en service et qui retournèrent sur leur pavillon. Nash devait rester, pour la suite, et dans l’espoir de mieux comprendre ce personnage qui éveilla sa curiosité. Il était inquiet, mais son intuition le laissa optimiste. Son ami de classe, Daniel, souri et lui souffla :

       –Bon courage avec la bureaucrate austère mais terriblement sexy, tu pourrais faire un effort pour ta carrière. J’ai des regrets à ne pas être balmé…

       –Tu es fou ! s’écria-t-il. Je te donne ma place de blâmé si tu veux, de nos jours tu n’auras aucun mal !

       –Amiral Nash ! Appela la ministre, réquisitionnant l’attention des deux amis qui la fixa aussitôt, elle se leva et s’approcha d’eux pour dire :

       –Nous avons rendez-vous je crois, veuillez me suivre. 

Elle salua le commandant Daniel pour prendre congé de lui. Nathan lui serra la main pour lui dire au revoir et suivit sa ministre dans son bureau, derrière la salle de réunion.

       Nathan était à la fois curieux de découvrir son interlocutrice et inquiet de son avenir dans la flotte, ne sachant pas trop à qui il avait à faire, cette dernière étant imperceptible.  Il espérait pouvoir la dévoiler un peu plus au cours de son entretien. Son bureau était grand et vidée d’une décoration limitée au strict minimum, derrière son somptueux bureau en bois rare depuis le siècle passé, il y avait une grande vitre donnant une vue magnifique sur la vieille ville de Londres.

       Elle s’assoit sur son fauteuil de cuir imposant et l’invita à s’assoir, puis elle prit la parole :

       –Savez-vous combien d’officiers gradés rêvent d’asseoir leurs grandes ambitions en commandant un vaisseau tel que le Bellérophon ?

       –Je suppose qu’il y en a beaucoup, Madame.

       –Oui, beaucoup, amiral. Je ne veux pas d’hommes aux commandes d’atouts de notre flotte pour faire plaisir aux ambitions de personnes dont les amis ont des positions influentes. Bien sûr il m’est arrivé de le faire, souvent, sinon je ne serai pas là. Mais je suis convaincue qu’en cas de circonstances graves, ce ne seront pas eux les plus efficaces. Je sais que vous me comprenez, amiral, argumenta-t-elle.

       Pour Nathan, c’était comme un choc, il n’avait connu que deux ministres avant elle. Il avait rencontré bien des personnalités politiques et c’était bien la première fois qu’il put rencontrer un si haut fonctionnaire nommé qui rompt avec ces valeurs arrogantes. Ainsi, elle se dévoila un peu à lui, il s’interrogea sur son passé. Comment une personnalité comme elle avait-t-elle pu réussir ? Elle doit surement bien cacher son jeu dans le royaume de l’hypocrisie. Il répondit :

       –Oui, madame, je partage votre avis, un homme d’expérience et de terrain a certainement plus de valeur au combat et au commandement plutôt qu’une personne, qui a réussi en prenant des raccourcis.

       –Bien, il est évident que l’on se comprend, en quelque sorte. Je ne me ferais pas d’avantages d’amis, car je compte bien vous maintenir à votre poste sur le Bellérophon, Ainsi que votre commandement de la septième flotte expéditionnaire. Flotte qui inclura toujours la frégate Stella Serena, le croiseur Andrasta ainsi que le ravitailleur-extracteur Eureka Nine. Ceci étant dit je vous mets un blâme dans votre dossier, pour la formalité administrative. Puisque certains représentants du conseil ne seront pas vraiment satisfaits de cette faible mesure. Malgré tout, cela aura pour conséquence de geler votre échelon et votre solde.

       Surpris, Nash répondit :

       –Bien Madame, pour tout vous dire je m’attendais à bien pire, vu la sévérité disciplinaire ces dernières années.

       –Vous auriez pu vous attendre à pire, mais j’en ai décidé autrement car j’ai besoin d’un homme d’expérience. J’ai à vous confier une nouvelle mission d’exploration, au-delà des frontières connus de l’homme. Je sais que vous êtes fait pour ces missions et que vous en avez déjà beaucoup à votre actif. Vous embarquerez dans deux mois, avec une équipe de scientifiques menés par le docteur Haiden. Les détails vous seront envoyés sur votre tablette. Le but est d’aller vérifier le potentiel colonisable d’une planète, codifié Z-BX-34, repérée par une de nos sondes du programme Céleste. Ce sera un long voyage de six mois, amiral. 

       Nathan avait œuvré toute sa vie pour faire carrière dans la flotte d’exploration, il avait toujours rêvé d’explorer l’espace. C’était pour faire cela qu’il était devenu militaire. Il avait déjà accompli de nombreuses missions sans succès mais son rêve inavoué est de découvrir un monde nouveau, surtout depuis qu’il est père. Il voudrait un monde dans lequel vivre vraiment, pour elles, pour eux, bien qu’il n’ait pas très foi en l’homme pour ne pas tout saccager comme sur Terra Nova ou la Terre. Ces images d’elle autrefois, bleue, verte et vivante. Il la compare avec ce qu’il en voit maintenant, cela lui laisse un gout amer. Il se demande encore aujourd’hui pourquoi, comment ses ancêtres ont-ils pu laisser un tel héritage ? Il n’y avait guère de plus belle planète dans tout l’univers que lui et ses siens ont pu explorer. Les livres numériques d’histoires accusèrent les hommes d’autrefois, le consumérisme, le gaspillage, la concurrence féroce entre les anciennes nations, le progrès, la surpopulation. Les livres lui ont enseigné que tout cela a bien changé, que les hommes d’aujourd’hui se sont immaculé des péchés de leurs ancêtres. Pourtant, bien des maux d’autrefois sont toujours à l’œuvre aujourd’hui, les uns exploitent les autres, les hommes sont toujours divisés et ils courent toujours pour le pouvoir, insatiables.

       Il reprit :

       -Bien, madame, j’ai déjà fait bien des missions comme celle-ci, vous pouvez me faire confiance. Je reviendrai avec votre équipe scientifique, et des résultats que j’espère positifs.

       –Je n’en doute pas. Votre vaisseau est toujours en réparation. En attendant, les restrictions budgétaires ne me permettent pas de financer la fin des tests de fiabilité concernant l’Aegis. Il reste donc difficile d’évaluer un usage éventuel et il restera au statut d’arme expérimentale.

       –Madame, puis-je vous demander de considérer ma demande, j’apprécierai de pouvoir continuer à travailler avec mon équipe habituelle.

       –C’est déjà vu, il est prévu qu’ils embarquent avec vous. Vous pouvez disposer, amiral.

       –Je vous remercie pour votre confiance, au revoir, Madame.

       –Nous nous reverrons amiral, avant votre départ, conclu-t-elle.

       Satisfait de cette entrevue qu’il lui parut quelque peu inhabituel. Il contacta son ami Daniel, sur le chemin de la maison vers Paris. Il voulait lui annoncer la nouvelle sans trop entrer dans les détails, il se refusa que l’excès de confiance que lui accorda la nouvelle chef de guerre ne s’ébruite.

       Il avait surtout hâte d’annoncer à sa femme la bonne nouvelle, qui aurait surement préféré qu’il reste plus souvent à la maison. Cependant, elle savait à quoi s’attendre en se mariant avec un militaire. Il était assis dans la navette du retour, il voulait voir la ville de Londres mais la publicité intrusive sur le vitrage l’obligea à se lever. C’était une ville moderne et ancienne à la fois. L’ancienne ville avait beaucoup disparu après la troisième guerre mondiale et sa restructuration après la montée des eux.

       Mais surtout épuisé de cette matinée mouvementée, il préféra se rassoir et regarda la publicité du ministère de la santé publique. Elle le fit sourire, elle incita ceux qui la regardaient à faire des enfants. Il se dit que les gens n’avaient ni l’envie ni le temps de faire des bébés. Avaient-ils déjà seulement l’envie de se rencontrer et de s’amuser ailleurs que sur les réalités virtuelles ?

       Il arriva sur Paris et regagna son habitat, sa femme n’était pas rentré, elle avait un tiers temps, elle travailla sept heures sur vingt-quatre que compte la journée. Deux autres personnes occupaient son poste en son absence pour remplir le créneau horaire. Le monde ne s’arrête pas, même quand la nuit tombe, nulle part. La société œuvrait toujours, il le faut bien, il y avait beaucoup de monde à faire vivre, à faire travailler et une économie qui ne devait pas s’arrêter. Alors le temps de travail fut rationnalisé pour tous, seuls dérogeaient à la règle les hauts fonctionnaires, les militaires, les cadres supérieurs, le monde médiatique et artistique. Car ces derniers avaient un emploi du temps spécifique. C’est ce petit gout de la liberté à pouvoir gérer son temps qui avait fait de Nash un militaire afin ne pas être soumis à un tiers temps.

       Il ouvrit la télévision, un holographe opaque sortit du sol. C’était les informations quotidiennes. En titre aujourd’hui, la dette abyssale du gouvernement fédérale. Ainsi que le décès du 13ème membre du directoire du consortium bancaire à l’âge de 108 ans, son fils lui a succédé depuis plusieurs mois. Il fut décoré en 2202 pour avoir collaboré avec le gouvernement fédéral de l’époque, accélérant la chute de la piraterie spatiale.   

       Au même moment la porte automatisée de l’habitat s’ouvrit, voilà sa fille qui rentra des cours. Nathan voulut lui parler mais la voilà déjà isolée dans sa chambre. Il frappa à sa porte, pas de réponse, il entra. Léthargique, elle était déjà allongée avec ses lunettes de V-World sur les yeux. Il la secoua :

       –Loumène, ça va ? Je veux te parler un peu.

       –Papa t’es chiant, je veux me détendre ! Qu’est-ce qu’il y a ?

       –Quoi ? avec ça ? ca détends rien du tout, on dit que ça te grille le cerveau ! Parce que tu es allongée à ne rien faire à part user tes rares neurones !

       –Haha tu es trop drôle papa, toi aussi tu dois ne pas en avoir beaucoup, t’en as eu un à ce que je sache ?

       –Oui un vieux modèle, bon tout ça pour dire que je serai à la maison encore deux mois, puis je repartirai en mission quelques temps…

       –Bon super, tu gardes ton travail et tu vas encore partir et après? Tu peux me laisser je vais rejoindre des potes, on va faire une course de RaceTrack, puis aller dans un bar, ok ?

       –Pourquoi tu ne les rejoins pas en vrai ?

       –Parce qu’on va s’ennuyer, il n’y rien à faire et ils habitent à 30 minutes en navette…

       –Tu feras peut être pas du RaceTrack mais tu pourrais les voir en vrai.

       –Pour faire quoi ? On va s’ennuyer papa, bon je suis en retard, tu me lâches ?

       –Tu te souviens de jour de tes 16 ans où je t’ai acheté cette connerie ?

       –Oui. Nous sommes sortis avec ma maman au restaurant. Au soir, nous avons regardé les étoiles à deux, tu m’avais expliqué pourquoi tu étais si souvent absent.

       –C’était bien mieux que de rêvasser, conclut-il avec nostalgie.

       Nathan sourit, puis sortit de la pièce, laissant sa fille vaquer à ses occupations virtuelles.  Après tout, il était pareil à son âge avant de trouver sa vocation. Il pouvait passer des journées entières à y faire des choses moins spectaculaires, mais plutôt interdites à ce jour. Au moment de la démocratisation du V-World, il pouvait accéder à d’autres réseaux illégaux, ces derniers ont étés bloqués il y a vingt ans et quelques par le gouvernement fédéral. Afin de brider les communications hostiles au gouvernement pour « protéger » les jeunes, principaux utilisateurs de ces jeux. Le gouvernement craignit l’embrigadement des jeunes par ces organisations réfractaires à l’ordre en place. Mais aussi la reproduction d’effets de drogues sur le cerveau dans sa consommation virtuelle, les jeux d’armes avec douleur, les jeux de courses trop hardcore.

       Tout était créé par les utilisateurs, des mondes dans un univers. Surtout, tout était gratuit, « open source ». Aujourd’hui de puissants éditeurs trustent le V-World et monétisent tout. Grâce aux nouvelles techniques de programmations complexes, les mondes open source sont devenus caducs. C’était la bonne époque du V-World pour Nathan, un vrai vent de liberté de son jeune temps. Il avait fait partie d’une de ces organisations  rebelles, il n’avait que 15 ans, bien avant de s’engager dans l’armée. C’était des jeunes qui se réunissaient, s’amusaient et bravaient les interdits. Certains d’entre eux ont commencé à vouloir créer des réseaux pour s’organiser contre la politique du gouvernement qu’ils trouvèrent abjecte. Ils ont hacker des sites gouvernementaux, des espaces publicitaires, pour pousser les gens à la révolte citoyenne. Infiltrés, les têtes de réseaux tombèrent une à une, et les accès furent bloqués.

       Nathan avait eu peur d’être impliqué, car ils les avaient côtoyés. Il ne fit rien de grave pour lui, mais il avait quand même cessé d’utiliser le V-World pour ces activités. Le gouvernement trouva difficilement les récalcitrants à son ordre. Jamais de chiffres ne furent divulgués sur ces affaires, car en réalité, énormément de jeunes de l’époque avaient des revendications. Voilà pourquoi sa génération fût qualifiée de si difficile.

       Tout le monde l’utilisait, pour des tas de choses, pour s’évader surtout, même s’il était bridé et onéreux, le V-World resta attractif. Pour un tiers temps seul, la vie se résume à sept heures de travail pour le financer, sept heures de sommeil pour se reposer et sept heures de V-World pour s’amuser, voilà la vie de beaucoup de gens. Il n’était rien d’autre que le descendant d’internet en réalité virtuel, bourré d’activités ludiques.

       Même s’il avait eu sa période V-World. Nathan regretta de voir sa progéniture allongée, inerte, vivant sa vie dans un monde de faux, de rapports sociaux qui ne sont pas naturel grâce à l’anonymat du procédé. Le tout entretenu par de puissantes industries qui ne s’en cachent pas, l’une d’elles a le slogan « concepteur de rêves depuis 2195 »

       Toute cette énergie, cette créativité que les jeunes devaient apporter au monde en enterrant leurs ainés. Nathan avait la sensation désagréable de la voir aspirer dans une machine à rêver, une machine à dormir pensa-t-il.

       C’était au tour de Cassandra de rentrer, sa femme adorée. Elle n’était pas de très bonne humeur. Il se demanda aussitôt ce qui n’allait pas :

       –Ca va pas chérie ?

       –Tu as regardé les infos ?

       –Je les aie mises mais je n’ai pas écouté, j’ai discuté un peu avec Loumène…

       –Regarde un peu ça ! Dit-elle en augmentant le volume.

« Le ministère de l’instruction publique va changer le modèle éducatif actuel pour mieux s’adapter aux besoins de la jeunesse de demain. » Expliqua le journaliste.

       –Qu’est-ce qui va changer pour toi ?

       –Grosse réunion avec le recteur cette après-midi, ils veulent qu’on donne les cours sur un V-World éducatif. Ils veulent reclasser tous le personnel technique et administratif de l’école, il compte mettre ça progressivement en place dans le monde entier. On est l’un des premiers secteurs d’expérimentation.

       –Ah d’accord, déjà que les jeunes d’aujourd’hui y passent beaucoup trop de temps si en plus ils doivent l’utiliser pour l’école…

       –Le ministère est convaincu qu’il obtiendra de meilleurs résultats grâce au côté récréatif du procédé, on ne va pas les brancher sur ses trucs comme des débiles dès 4 ans !

       –J’ai du mal à comprendre, les scientifiques sont plutôt sceptiques sur les bienfaits d’une utilisation excessive des mondes connectés.

       – Je pense plus que c’est pour des raisons de coupes budgétaires.

Le couple se fixa dans les yeux, ils n’aimaient pas ça. Ils étaient suffisamment intelligents pour comprendre le douloureux processus de déshumanisation qui s’accéléra au sein même de l’éducation.

       Cassandra, éprise d’un sentiment de colère face à ce cynisme fondit en larme. Pour elle aussi, son métier était une part importante de sa vie, sa passion d’enseigner, donna un sens à sa vie. On lui enleva une partie d’elle, Nathan serra alors sa femme tendrement pour la rassurer, elle qui était si sensible. Il savait bien au fond de lui que demain ne serait pas meilleur qu’aujourd’hui. Il sentit alors que c’était la fin de quelque chose, d’une période. Pour le comprendre, il lui suffisait de regarder autour de lui comme ce matin. Le visage des passants, usés, stressés mais surtout perdus, était pour lui le signe le plus poignant d’une décadence.  

Cassandra reprit :

       –Pardonne-moi je ne t’ai pas demandé comment ça s’est passé pour toi à Londres ? Sachant que tu t’inquiétais beaucoup pour la suite de ta carrière.

       –Curieusement, ça s’est bien passé. J’en ai déjà vu tombé pour moins que ça. Elle m’a couvert. Elle m’a confié une nouvelle mission d’exploration vers l’inconnu, départ dans deux mois.

Elle serra un peu plus fort son mari entre ses bras. Cassandra connaissait son homme et savait que pour lui aussi, son métier était important. Elle se douta des objectifs de Nathan quand il avait choisi de rejoindre le corps expéditionnaire. Puis, il en rêva la nuit, de ce monde vierge et immaculé.  Cassandra connaissait ou devinait les secrets de son mari. Au-delà de ça, elle l’aimait de tout son cœur.

       Elle le fixa, ses yeux brillaient encore :

       –Tu va me manquer, tu me manques toujours dès que tu pars ! On devrait faire quelque chose avec la grande.

       –On va profiter ! J’ai deux mois avant le départ.

Nath lui proposa aussi de prendre une douche ensemble, voulant déjà profiter de temps avec sa femme. Elle lui sourit, cela voulait dire oui.

       Le lendemain matin, Nathan se réveilla seul le cerveau en ébullition, il consulta sa tablette. Il avait bien reçu son ordre de mission. Sa femme et sa fille étaient déjà partis, respectivement au travail et au lycée.

       Il se leva et alla prendre son petit déjeuner en le commandant oralement à l’ordinateur de l’habitat. Ce dernier calcula ce qu’il avait en nourriture chez lui et ce qu’il lui manquera. L’habitat passa commande des ingrédients qu’il fallait pour sa préparation. Nathan n’avait plus qu’à utiliser sa main contenant sa puce d’identité bancaire pour payer ses courses.

       Il alluma la télévision en attendant son déjeuner. Des informations, encore pessimistes, annonçant des taux de chômage records de la population mondiale surtout sur Terre mais aussi sur Terra Nova. Le reportage montra des gens au chômage passant leur temps sur le V-World. Ils survivaient grâce au « revenu universel de subsistance » de l’Etat Fédéral. Possédant même une vie virtuelle qu’ils n’auraient jamais en vrai grâce au temps passé dessus. Nathan comprit que si ces gens étaient critiqués, alors même qu’ils étaient poussés à cette consommation virtuelle. C’était afin de faire culpabiliser ces gens marginaux, permettant alors de distiller la peur à ceux qui étaient en activité. Alors, il conclut que les mondes des rêves étaient devenus l’opium du peuple pour acheter la paix sociale et maintenir l’ordre.

       Pendant que Nathan vaquait à ses pensées, son petit déjeuner était déjà là. Les courses furent livrés dans son tube-habitat par un drone. Il ne lui restait plus que la tâche ingrate de mettre les ingrédients dans le robot-cuisinier qui préparera son déjeuner. Les drones transportaient chaque jour de la nourriture à des millions de foyers, ils avaient leurs propres voiries pour circuler. Ils existaient depuis toujours pour Nathan, il pensa à son grand père qui haïssait les drones. Ce dernier disait qu’on ferait des gens des esclaves car ils suffiraient d’arrêter les drones pour qu’ils crèvent de faim. Nathan trouvait ça drôle que son grand-père rageait de la sorte, alors qu’aujourd’hui, lui s’en accommoda parfaitement. Il se senti prendre un coup de vieux, puisqu’il avait désormais le même ressentiment que grand-père concernant les cours par réalité virtuelle imposés à sa femme.

       La jeunesse s’accommoda bien des progrès technologiques, la maturité beaucoup moins. Se voyant à un carrefour de son existence depuis quelques temps. Il comprit, avec du recul, comme grand-père, ce qu’il pouvait y avoir de malsain. Il réfléchit longuement à la question en déjeunant. Ce n’était pas une question d’outils technologiques, car le progrès ne s’arrêtera jamais et est utile aux hommes. C’était la question de savoir si c’était pour un bon usage tel que faciliter l’accès à la nourriture pour tous, ou un mauvais usage, tel qu’un outil de contrôle alimentaire de masse.  

       Il reçut une notification pour message sur sa tablette : 

       « Salut Nathan, c’est Daniel, je suis bien arrivé à la station de défense orbitale de Terra Nova, je naviguerai dès demain. Ici c’est le branle-bas de combat, vraiment. La première quatrième, huitième, douzième ainsi qu’une demi-douzaine de non affectés sont ici pour trouver Lazare. Apparemment, la même force offensive est déployée pour la Terre. C’est juste incroyable de voir un tel attroupement. Ils font une opération conjointe avec les sidoniens, Il faut croire que l’état tient vraiment à cette alliance. Lazare a encore refait parler de lui récemment, il a neutralisé un remorqueur terrien et détruit deux frégates sidoniennes. Bon c’est les nouvelles depuis Béotos, j’espère que tu vas bien et que tu profites avant ton départ. 

       Nathan se demanda pourquoi Lazare épargne les terriens et anéantit les sidoniens ? Ça n’a pourtant que peu d’intérêt pour un pirate.

       –Daniel, bonne chance dans ta mission, soit prudent quitte à faire la même connerie que moi. On se retrouve à mon retour dans six mois.

       Nathan pensa à s’occuper comme d’habitude lors de ses repos entre ses longs séjours dans l’espace. Il avait peu d’amis, puisque la plupart des gens vivaient pour le travail et se retrouvaient dans le V-World, ce qui n’était plus son truc. Il se considérait trop réveillé et vivant pour rêver. Il savait que dans ce paradoxe, la technologie avait rapproché les gens sur le plan virtuel, mais elle les avait éloignés de la réalité. Il avait compris depuis un certain temps que cela était un facteur ayant accéléré le processus d’uniformisation et de conformisme des individus dans le monde. Au fil de l’évolution de la civilisation, cela rendit les gens moins enclin à se haïr en raison des différences. Mais cela rendit aussi beaucoup plus ennuyeux les rapports humains réels.

       Il n’avait pas grand-chose à faire pour tuer le temps. Cependant, il savait qui contacter pour passer un bon moment. Il fallait être avec ceux partageant tous ce même goût pour l’aventure, des voyageurs d’au-delà le ciel.

       Nathan donna un ordre oral à l’habitat d’envoyer un message à ses gens, les officiers de la passerelle du Bellérophon :

       Lieutenants Lydia Da Silva pour les communications, officier en second. Bastian Oswald pour les radars,  Séraphin Luciano pour la cartographie et l’informatique, Sylvestre Dogett pour les armes. Le chef d’escadrille, capitaine Mickael Miller. Enfin son vieil ami, le commandant Meyer du Stella Serena.

       Ils vivaient tous dans la mégapole Parisienne, ils seront alors rapidement au rendez-vous s’ils répondaient présents, ils répondaient toujours positivement à l’appel. L’invitation était donnée dans l’un des derniers pubs irlandais de la ville qui attirait toujours autant de monde du voyage.

       Nathan sortie de son appartement pour s’y rendre à pied car il avait envie de prendre son temps. Il avait l’impression d’être étranger dans ce monde à vouloir prendre son temps. Les gens n’avaient plus le temps, bien que la technologie ait toujours tout fait pour leur en offrir plus. A croire que cette course effrénée ne suffira jamais, se disait-il.

       Les passants utilisaient des petits engins rapides à même le trottoir, les conducteurs utilisaient des engins à plusieurs places un peu plus gros.

       Nathan regardait les gens, de cette ancienne province France. Personne ne regardait autour de soi-même, c’était à peine s’ils regardaient devant eux. Toujours plongés dans leurs tablettes connectées, avec son lot de loisirs, comme seul évasion d’un univers morose.       

       « L’avenir se transmet au sein d’une famille, ensemble, avec vous » disait une publicité gouvernementale envahissante dans les rues. Elle parlait de faire des enfants et de l’aide financière voir technique de l’état, car beaucoup de femmes avaient du mal à enfanter naturellement.

       Seulement, les gens s’occupaient autrement, qu’ils travaillent, survivent ou rêvent. Contradictoire puisqu’aucun politicien ne remet en cause l’envahissement technologique comme un enjeu de santé publique, surement à cause de puissants lobbyings. Ceci dit il semblerait important d’avoir une population jeune.  

       Nathan leva les yeux au ciel, il était bien gris pour ce mois printanier de mars. Puis il vit un pigeon aller au sol pour son repas, avant de se le faire voler par un robot nettoyeur automatisé. Dommage pour le volatile, pensa-t-il.

       Nathan poursuivit sa route jusqu’au pub qui n’était plus très loin.

       –Amiral! S’écria le lieutenant Da Silva, première arrivée, comme je suis contente de vous revoir. Nous qui étions persuadés qu’on n’aurait plus l’occasion de servir ensemble quand on s’est quitté sur Eole.

       Oswald et Luciano arrivèrent ensemble, Nathan les virent et saluèrent ses hommes :

       –Moi aussi je suis heureux de vous retrouver. J’aime bien être ici mais je me sens mieux dans l’espace. D’ailleurs, vous avez dû tous recevoir votre ordre de mission. D’ici deux mois, nous partirons tous pour un nouveau monde dont nous serons peut-être les pionniers. Alors oui, je suis content d’avoir pu garder mon pavillon.

       –Bordel ! Encore un caillou sans intérêt à visiter ! 

Entendirent le petit groupe, voilà l’officier le plus extraverti de la passerelle, le lieutenant Dogett. Puis très vite, arrivèrent le commandant Meyer et le capitaine Miller.

       Le petit groupe entra dans le pub irlandais pour aller s’installer sur leur table ronde en bois habituelle dans le fond. Un coin un peu lugubre et discret que le propriétaire des lieux laissa à ses clients privilégiés. Ce dernier s’avança, salua la table et pris commande. La conversation reprit :

       –Vous êtes toujours partant pour l’inconnu ? Demanda Nathan.

       –Toujours, j’espère qu’on y trouvera quelque chose d’intéressant cette fois. Qui nous accompagne ? Demanda Dogett.

       –Comme d’habitude, la septième flotte expéditionnaire que je commande. La frégate, Stella Serena, le croiseur Andrasta de Powell et l’Eureka Nine de Logan.

       –Ah je n’aime pas beaucoup le commandant Powell, j’ai passé mon épreuve pratique  avec lui, il ne fait pas de cadeaux, s’exclama Luciano.

       –C’est vrai qu’il est rigoureux mais c’est un excellent officier commandant. Vous verrez vous-même un jour, repris Nash.

       –Je ne pense pas faire carrière toute ma vie à l’armée, déclara Miller.

       –Que veux-tu faire après ? C’est compliqué de se reconvertir de nos jours, lui demanda Da Silva

       –J’aimerai faire quelque chose de plus utile et de moins ennuyeux, répondit-il.

       –J’avais des copains qui ont quittés l’armée pour le civil, figure-toi qu’ils savent ce qu’est l’ennuie maintenant, le vrai, répondit Meyer.

       –Ce n’est pas plus mal de s’ennuyer à l’armée, au moins, il n’y a pas de guerres, pas de morts, dit Dogett.

       –Nous faisons quelque chose de dur mais d’utile. Notre mission est de chercher un nouveau foyer.

Le propriétaire des lieux revint apporter les boissons.

       –Vous avez entendu parler de l’opération en cours pour neutraliser le Lazare? Demanda Da Silva.

       –J’ai un ami sur le Pax Terra Nova qui m’a confirmé des mouvements de flottes entières, expliqua Dogett.

 Le propriétaire du pub entendit la conversation et souri. Nathan ne put s’empêcher :

       –Qu’est-ce qui vous amuse ?

       –Désolé Amiral, nous nous connaissons depuis longtemps, vous savez que j’ai servi la marine marchande pendant plus de quarante ans. J’ai vu Lazare, il ne se montre uniquement quand il en a envie. Il ne sera jamais proie, c’est un chasseur. Prévint le vieil homme avant de s’éclipser.

       –Il est vraiment bizarre ce type, dit Oswald.

       –La prochaine tournée est pour moi, enchérit l’amiral Nash.

Le petit groupe continua de passer sa soirée à discuter, à boire, à refaire le monde dans cet endroit sombre mais si convivial.

       Toutefois au cours de ces échanges, une compréhension mutuelle s’était établit entre le lieutenant Da Silva et le capitaine Miller. Ils s’entendirent bien et s’échangèrent quelques regards.

       La soirée prit fin au bout de quatre heures dans le pub. Ainsi, chacun repartirent chez lui, sauf deux âmes qui repartirent ensemble ce soir-là. Ils se reverraient tous dans deux mois pour l’embarquement depuis Eole.

       Nathan avait passé une excellente soirée, bien qu’il soit quelque peu sou. Il rentra à pied, évitant les automates policiers pour état d’ivresse sur la voie publique. Arrivé à l’habitat, sa femme et sa fille étaient déjà couchés. Il alla voir Loumène dans sa chambre, elle dormait, fatiguée de sa journée, fatiguée d’avoir passé trop de temps sur le V-World. Il voulait lui faire un bisou sur le front mais il la réveilla en butant un meuble quand il arriva :

       –Ah papa… lui dit Loumène en somnolant.

       –Excuse-moi ma chérie. Au fait, demain tu n’iras pas à l’école.

       –Pourquoi?

       –Demain, sortie familial. Bonne nuit ma puce, à demain.

Puis il sorti de la chambre de Loumène pour rejoindre le lit conjugal et il fit encore du bruit sur un meuble. Cassandra comprit :

       –Tu étais encore dans ce bar de triste? Demanda-t-elle.

       –Oui, lui répondit Nathan, quelque peu gêné.

       –Je m’en doutais ! Tu aimes vraiment ce pub. Allez vient te coucher, tu m’as manqué ce soir.

       –J’arrive chérie, je me déshabille.

Nathan, sou, eut du mal à tenir l’équilibre en défaisant son pantalon. Il ne put se retenir de tomber sur le lit, écrasant sa femme. Elle trouva sa maladresse amusante.

       –Je t’aime ma femme, je ne sais pas ce que j’aurai fait dans ma vie si je n’avais pas eu la chance de t’avoir. Je suis sou et tu t’en amuses !

       Elle se tourna vers lui.

       –Je ne sais pas ce que j’aurai fait moi aussi, je ne vois plus le temps passé.

       Elle l’embrassa et dès qu’elle eut finit son baiser, il lui répondit que demain, personne n’ira travailler car il avait prévu quelque chose. Ils s’enfouirent ensemble sous les draps dans leur intimité.

       Le lendemain venu, personne n’avait rejoint son activité quotidienne, car aujourd’hui était une journée différente. Pour une fois, ils purent prendre le petit déjeuner tous ensemble, sans avoir à être décalé.

       Après s’être habillé, ils se rendirent au train magnétique afin d’aller à la base militaire aérospatiale de Stuttgart. Après quinze minutes de trajet, les voilà arrivés à la base où Nathan avait prévu une surprise à sa famille.

       L’amiral s’authentifia au hangar des appareils spatiaux, son grade lui autorisant les accès. L’officier du hangar ne l’avait pas dans son registre de vols et voulut demander des explications. Nathan Nash, en tenue militaire, portant ses étoiles, lui expliqua qu’il allait  réquisitionner  un appareil militaire de transport et de reconnaissance, un vulture F-154. Il lui expliqua avoir commandé des couloirs de vol sur Terre. Le responsable ne s’obstina pas face à un officier de haut rang, il se contenta de contrôler le créneau disponible auprès de la tour. On demanda à l’amiral s’il lui fallait un pilote, cela le fit sourire et il emmena sa famille dans le vulture. L’appareil décolla, Loumène était toute excitée, Cassandra étant un peu plus inquiète.

       –Ça a l’air tellement plus fun de monter dans un vrai vulture ! S’exclama Loumène.

       –Aujourd’hui nous allons faire un petit tour mes chéries, répondit fièrement Nathan.

       –Où allons-nous ?

       –Nous allons voir la beauté de la Terre. Préparez-vous, nous allons faire petit un saut spatial pour notre première destination, l’Amérique du sud. 

       Soudain le nez de l’appareil se mit à disparaitre dans épais nuage orageux l’enveloppant. Il englouti l’appareil vers le vide. Stressée, Cassandra demanda :

       –Qu’est-ce qui se passe ?!

       –T’inquiète pas maman, c’est un bond spatial. Nous sommes en train de sauter, nous disparaissons de ce côté pour réapparaitre ailleurs.

       –Ça semble toujours inquiétant la première fois, ajouta Nathan.

Il se moqua gentiment de sa femme qui recula sans cesse de son siège. Elle avait peur mais il lui prit la main pour la rassurer. Puis le vaisseau franchit le portail et se retrouva de l’autre côté, en Amérique du sud.

       L’appareil survolait désormais l’une des plus anciennes forêts du monde, l’Amazonie. C’était magnifique vu d’en haut, ses espaces verts à perte de vue, serpentée en son cœur par son fleuve nourricier. Les deux femmes étaient agréablement surprises de la vue. Loumène ne put s’empêcher d’être enthousiaste de voir ses véritables paysages et de le comparer au V-World, artificiellement plus beau mais sans saveurs.

       –On y faisait autrefois poussé des arbres d’huiles parce qu’on en avait besoin pour des tas de choses. Quand l’humanité a enfin décidé de protéger le dernier poumon de la terre, ils décidèrent de faire des projets de reforestations, dieu merci, dit Nathan.

       Le vaisseau arriva ensuite vers les magnifiques chutes d’eau d’Iguazù, un paysage magnifique et impressionnant. La véritable force de la nature dans toute sa splendeur.

       Puis Nathan fit sauter le vaisseau en direction de la pointe sud-africaine, les montagnes de la table, surnommées ainsi en raison de ses sommets plats. On y dit que « la nappe est mise » quand les nuages l’accrochent. En survolant le continent, Nathan dit :

       –Quel magnifique continent nous décrivaient les anciens! Une contrée peuplée d’animaux sauvages et libres. Beaucoup ont disparu, heureusement l’humanité a su en préserver certains dans des réserves. Malheureusement, un animal sauvage à la liberté limité devient domestique.

       Le vulture survolait le continent le plus riche du monde, qui avait un lourd passé sans droits, empli de souffrance. Un territoire sur lequel les hommes qui y vécurent avaient donné jusqu’à leur dernier souffle depuis toujours pour leurs survies, ayant lutté contre l’ancien impérialisme occidentale.

       Le paysage resta magnifique. Il y avait de grands espaces sauvages et des contrés vierges de flore, la faune ayant été vandalisé.

       Cependant, ils survolèrent une réserve naturelle, plus riche en animaux mais ces derniers souffraient de la captivité pour leur protection. Le manque de patrimoine génétique et l’enfermement auront eu raison de leurs existences libres. Ceci dit il restait intéressant de voir l’héritage de la terre et l’œuvre de l’existence de l’homme.

       Nathan voulut désormais se rendre en Asie. Le petit vulture traversa d’immenses contrées du moyen orient désertique. Nathan n’était guère étonné de voir cela, grand-père lui avait expliqué que si ces terres étaient devenues arides, c’était à cause de la surexploitation agricole et l’utilisation abusive d’engrais usant la terre, le tout combiné au réchauffement climatique

       La prochaine destination du vulture était l’île volcanique de Jeju-do, dans l’ancienne Corée du sud. Le volcan éteint Hallasan étant le point culminant de l’île du haut de ses 2000 mètres.  Sa famille vit encore des paysages exotiques les plus beaux du monde Terrien.

       Nathan passa les commandes à Loumène afin de mener le vaisseau dans un autre paysage. La baie de Halong qui s’étend sur plusieurs millier de kilomètres, parsemée d’îlots. Là où d’imposantes roches surgissaient de la mer et se dressaient vers le ciel.

       Un peu plus au sud, en Indonésie, le vaisseau se dirigea vers les îles de Komodo. De nombreuses îles couleur sable encerclées d’une mer bleu turquoise. Elles étaient réputées pour avoir longtemps abrité le plus grand lézard du monde contemporain.

       Enfin le vulture se dirigea un peu plus au nord, vers les philippines. Pour la dernière visite, Nathan ne voulait pas se contenter de survoler la zone. Il dut se poser et tous descendirent. Il voulait visiter en famille la rivière souterraine de Puerto Princesa. Au sol, ils en profitèrent pour prendre un repas dans cette zone touristique. Puis ils prirent une embarcation de touristes afin de naviguer dans le cœur de la grotte de sept kilomètres pleines de chambres dévoilant ses imposantes stalagmites.

       La visite et la journée touchèrent à leur fin. Loumène se dit qu’il n’y avait guère de reportages sur ces lieux. Quant au V-World, lui permettant de voyager virtuellement. Il lui vendit une version idyllique du siècle passé du monde. Nathan lui répondit que le monde des rêves lui montrait des choses qui n’étaient plus.

       Avant de partir, Nathan proposa une dernière destination à sa famille, l’Antarctique.

Le vulture décolla, libérant derrière lui une trace blanche de son passage. Il survola désormais le grand Nord de la Terre. Ils y vinrent d’anciennes structures en ruines abandonnées dont on ne parlait peu, présentes dans le V-World tels des vestiges.

       –Il s’agit d’anciennes plateformes pétrolières. Nos ancêtres utilisaient le pétrole comme énergie avant l’ethérium. Autrefois, ce continent était beaucoup plus grand. L’ironie du pôle nord c’est que ces mêmes énergies fossiles ont accéléré la fonte de ce continent glacier, permettant d’exploiter plus de pétrole présent ici jusqu’à la dernière goutte. Il y a eu ici d’importantes guerres maritimes entre les anciennes nations pour le contrôle de ces ressources. Il y eut de grands bouleversements à cause de cette énergie fossile, comme la troisième guerre mondiale mais et le début d’une gouvernance mondiale.

       –Ne pouvaient-ils pas faire autrement ? Demanda Cassandra.

       –L’ethérium  n’a été découverte sur Mars qu’à la moitié du 21ème siècle, lors des premières conquêtes spatiales. Cela a permis à l’humanité de cesser sa guerre, de se développer et de dépasser les frontières de l’espace comme jamais.

       Depuis le vulture, la famille Nash pouvait y voir un bout de glace ainsi qu’un océan bleu jusqu’à perte de vue.

       Il était temps de rentrer, Nathan fit sauter le vaisseau une dernière fois afin de rentrer à la base aérospatiale de Stuttgart. Ce petit tour du monde des sept merveilles de la nature renforça les liens entre un père et sa fille. Ce dernier ayant sacrifié de son précieux temps pour être avec elle, afin qu’elle apprenne de lui. Sa femme était ravie de ce tour du monde en famille, même si ce monde n’allait pas dans le sens des valeurs que son mari essaya d’inculper à sa fille. Mais elle était heureuse de l’instant présent.

       –J’aimerai vous faire un tour de Terra Nova un jour. Ce monde n’est pas aussi fascinant que la terre mais certains paysages exotiques en valent le détour, dit Nathan en souriant.

       L’amiral amena le petit vaisseau à bon port. Il avait un peu honte d’avoir utilisé un équipement public pour ses déplacements personnels. La famille repartit à Paris au logement familial pour dîner. Nathan était heureux, c’était une belle journée puis une belle soirée. Il était avec les deux amours de sa vie, et c’était tout ce qui comptait. Ils ont continué de parler et à rire toute la soirée, jusqu’à ce que la fatigue vienne les chercher.

       Enfin, il alla se coucher avec Cassandra. Cette nuit encore, ils ne purent s’empêcher de s’aimer. Il la tenait entre ses bras affectueusement, puis il ferma les yeux et s’endorma.