IV – Rage

Dance of The Knights

« La guerre, c’est le massacre de gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas »

Paul Valéry, écrivain, poète et philosophe Français du 20ème siècle.


L’alarme de niveau trois retentit soudainement dans toute la flotte, déclenchée par le commandant Powell. Da Silva en poste et aux commandes du Bellérophon suivit l’alerte. Nathan en revue dans les entrailles de son vaisseau, utilisa son oreillette pour savoir quelle était l’urgence sur la passerelle. Oswald l’informa que deux bâtiments sidoniens avaient sauté dans ce secteur, il ne tarderait plus avant qu’ils ne tombent sur la flotte.

L’écran principal prit la couleur rouge combat, la voix de Da Silva retentissait dans tout le vaisseau :

       –Contact ennemi, tout le monde à son poste de combat ! 

Telle une cohue organisée, tous se rendirent à son poste en se croisant précipitamment dans les couloirs. Nathan se précipita également vers la passerelle, face à Da Silva, il lui demanda :

       –Situation.

       –Deux croiseurs sidoniens en chasse mon amiral, ils nous poursuivent. Quels sont les ordres ?

Hésitant, il lui répondit :

       –Il est trop tard pour les prendre par surprise, nous allons les affronter. Faites quitter la zone à l’Eureka Nine. Déploiement des escadrilles, virez à cent quatre-vingt degrés tribord. Nous allons les recevoir.

       Immédiatement les escadrilles de Miller quittèrent les ponts d’envols des deux croiseurs. Puis le Bellérophon et l’Andrasta se mirent en position sur le flanc tribord. Les deux bâtiments sidoniens s’avançant droit devant, il n’y avait plus qu’à faire feu au moment propice.

       Quelques instants plus tard, ils étaient à portée de tir. L’œil biomécanique de Dogett le rendait redoutablement efficace, sa vision prolongeant son tir.

Le croiseur ennemi qu’il visa fut atteint à sa tour de contrôle. Le croiseur sombra aussitôt en déroute, plongeant dans le vide spatial.

       Le second vaisseau prit par le feu de l’Andrasta subissait des tirs à sa proue avant. Aussitôt le vaisseau ennemi encore en lice répliqua et toucha l’Andrasta sur son flanc causant des dommages à ses batteries anti-aériennes. Suffisamment proche, le vaisseau ennemi se mit aussi sur le flanc. A partir de là, les échanges de tirs pouvaient s’en donner à cœur joie. Les tirs de canons centraux, de torpilles latérales, de batteries anti-aériennes, tout s’activait dans un artifice de feu morbide.

       Nathan ordonna la mise en charge de l’Aegis. Au même moment Oswald fit remarquer que quatre autres vaisseaux sidoniens arrivèrent par saut de l’autre côté, à bâbord. Deux croiseurs ainsi que deux escorteurs légers en soutien. Cela redéfinit le champ de bataille, trois croiseurs avec deux soutiens contre deux vaisseaux lourds terriens. L’Aegis en était capable, Nathan regarda sa montre et il savait qu’il fallait tenir cinq minutes précises contre cette force offensive.

       Il se doutait que l’ennemi aurait du renfort, mais il était trop tard pour rapatrier ses forces, puis il fallait encore frapper l’ennemi. Les nouveaux arrivants se mirent très vite à l’œuvre. Déployant leurs forces de chasse et leurs armes de frappes sur les deux vaisseaux humains. Nathan ainsi que Powell redirigèrent leurs tourelles centrales vers l’autre flanc contre les nouveaux arrivants. Les officiers exécutifs dirigèrent l’essentiel des forces de chasses vers ce même flanc. L’ordre de prédilection était la défense de l’Aegis, ce dernier était en train de capter de l’énergie spatiale pour se charger.  

       La flotte était prise entre deux feux ennemis plus soutenue vers bâbord. L’Andrasta et le Bellérophon subirent des tirs ennemis de toute part. Les tirs de barrages des batteries anti-aériennes ne suffirent plus à couvrir les forces de frappe de chasse à raison de leur supériorité numérique. L’amiral craignit que de nouveaux renforts ennemis arrivent encore, que l’Aegis ne puisse suffire et qu’il soit privé de bond spatial pour fuir. Le saut spatial est un outil très fragile à la chaleur, et les combats créent rapidement des incendies partout à bord. Mais les vaisseaux de guerres humains étaient un peu plus puissants.

       Les deux croiseurs humains concentraient leurs efforts sur les trois croiseurs ennemis, délaissant les deux frégates. Les chasseurs humains subissaient des pertes tolérables mais pénibles à voir sur écran.

       Pour les pilotes, les tirs de barrages défensifs des batteries anti-aériennes donnèrent l’avantage lorsqu’ils se tiennent à proximité de leurs vaisseaux. Les chasseurs sidoniens se montraient très offensifs et subissaient de lourdes pertes, certainement devaient-ils tolérer ses pertes. C’est à ce moment-là qu’il sembla apparent pour tous que les humains étaient de bien meilleurs pilotes et stratèges, doublés d’une motivation à toute épreuve. Alors que les sidoniens acceptèrent leurs pertes et s’appuyaient sur une stratégie du surnombre et de suprématie, basée sur leurs acquis.

       Il fallait tenir encore quelques minutes. Les frappes ennemies atteignirent les vaisseaux humains, des vitres se brisèrent, des hommes moururent et des incendies se déclarèrent. Sur l’écran de statut du Bellérophon, du rouge apparut un peu partout après chaque tir ennemi, réussissant à handicaper le vaisseau toujours un peu plus.

       L’écran radar se remplit lui aussi de rouge dû à la propagation de chasseurs ennemis. Miller mena son escadrille de combat comme un vrai chef de guerre soutenu par Oswald  et Da Silva, qui lui fournit les déplacements tactiques des chasseurs ennemis visibles sur ce radar.

       Nathan ordonna via l’intercom à Powell de concentrer un tir d’artillerie sur le vaisseau tribord simultanément que le sien. Alors Dogett fut mis en relation avec l’officier artilleur de l’Andrasta. Ce dernier délégua les commandes de tirs en semi-automatiques à ses artilleurs. Dogett lui expliqua qu’il prenait souvent les commandes en manuel d’une tourelle et qu’il faisait mouche, surtout grâce à une vision surhumaine due à son œil bio mécanisé. Il suggéra la même option en manuel à son collègue, qu’il connaissait très bien depuis les temps libres passés au sein de la flotte. Son homologue était réticent, car ce n’était pas conventionnellement recommandé par le livre de l’école de guerre qu’il avait appris. Dogett s’impatienta, puis s’écria :

       –Oubli ce putain de livre et tire ! 

Il suivi le conseil et prit le contrôle manuel direct d’une tourelle de son vaisseau. Puis, il cibla en même temps que lui le croiseur ennemi tribord. Ils se synchronisèrent et firent feu en même temps, comme le voulu l’amiral. Une double salve croisée des canons des deux vaisseaux partit simultanément et s’encastra dans le croiseur sidonien ciblé. Ce dernier subit une importante explosion sur la partie avant supérieure endommageant lourdement son armement et sa coque. D’une salve de tourelle, Dogett avait visé juste en anticipant la tentative d’esquive de l’ennemi. Son homologue n’avait pas réussi à mettre toute la salve mais il avait réussi à en placer deux sur trois. Le croiseur sidonien ne s’avoua pas vaincu si facilement et se mit à virer de son flanc moins endommagé pour avoir une meilleure canonnade. Cela n’échappa pas à Dogett qui demanda une seconde frappe similaire avant que l’ennemi puisse finir son grand virage, montrant un flanc neuf. Un luxe que ne peut s’offrir la flotte humaine en combat croisé.

       Nathan choisi de relâcher sa pression de feu temporairement sur eux afin d’essayer de mettre hors course un bâtiment ennemi avant que ce dernier ne se renforce en virant de bord. Ça peut être très payant si l’ennemi est fortement touché, tout comme cela peut être très ennuyeux si le tir au jugé échoue. Les combattants de la septième auraient au moins la pression relâchée sur un de ces flancs. L’amiral avait confiance en Dogett et lui accorda une nouvelle ouverture de tir.

       Le croiseur sidonien était en train de virer de bord. Dogett et son collègue reprirent le temps de viser puis pressèrent simultanément la gâchette. La tourelle avant-centre du Bellérophon cracha son feu d’une salve, les trois canons de la tourelle acculèrent ce tir. Le feu lumineux déchira le noir de l’espace et se dirigea vers sa cible. La salve de Bellérophon toucha l’ennemi droit dans sa carcasse, l’endommageant sévèrement, puis la deuxième salve suivie de l’Andrasta frappa la cible au même endroit. Cela créa une grosse explosion dans le ventre de la bête, créant sans doute une grosse avarie dans ce croiseur. Ce dernier continua de virer de bord, pour faire demi-tour, l’incendie devait se propager et ravager ses entrailles. Une immense trainée de fumée et de tôles froissés étaient délaissés dans son sillage.

       Les autres officiers de la passerelle ne cachèrent pas leurs joies sur leurs visages. Nathan était satisfait, il allait pouvoir recentrer ce combat en quatre contre deux sur un même flanc. Le vaisseau sidonien sur tribord étant en déroute. Nathan donna l’ordre de feu sur deux vaisseaux sidoniens, un croiseur et sa frégate.

       Au vu de la défaite de leurs collègues, les sidoniens changèrent de stratégie. Ainsi la flotte ennemie profitait de leur surnombre pour se mettre en mouvement autour de la septième en commençant par lâcher des tirs semi-automatisés sur la septième.

       C’est quelque chose que Nathan ne peut se permettre, se mouvoir réduit les chances de se faire toucher mais aussi sa précision de tir. C’était l’avantage numérique de l’ennemi et de ses nombreuses fenêtres de tirs, ils sacrifièrent de la précision pour esquiver plus facilement.

       Nathan regarda sa montre, Il ne fallait plus que quelques secondes à l’Aegis. Comment l’ennemi pouvait-il ignorer sa puissance de feu. Il y avait pourtant eu des survivants lors de leur première rencontre. Peu importe il fallait encore tenir, les lourds croiseurs humains continuèrent d’encaisser et l’ennemi s’en donna à cœur joie. Les lourds dommages commencèrent à se faire ressentir et les hommes craignirent le coup fatal les mettant en disgrâce. Des chasseurs en manque de munition commençaient à rapatrier. L’équipage du pont d’envol fit remarqué que les pilotes avaient très envie de retourner au combat, les pressant de les réarmer.

       Les hommes et les sidoniens continuèrent inlassablement à s’échanger des tirs d’usure.

Les vaisseaux tremblèrent violement sous les coups. Soudain un coup critique de l’Andrasta porté à un fragile escorteur sidonien le poussa à fuir le combat. C’était une excellente nouvelle, les forces ennemies se réduisirent mais le combat resta toujours à leur avantage. Oswald remarqua deux signatures énergétiques sidoniennes sur le radar long porté sans pouvoir donner plus de détails.

       La mise à feu de l’Aegis était imminente, il avait fini de charger. Les tirs ennemis continuèrent d’agresser la coque du vaisseau, finissant même par abîmer la figure de proue. Nathan leva les yeux face à la situation. Il ne comprit pas les sidoniens qui au vu de la charge énergétique accumulée et de la menace imminente, ne fuirent pas. Soit les sidoniens n’avaient pas peur, soit ils étaient fous, soit c’était un piège. Ne les connaissant que très peu il était difficile de juger mais la troisième option resta la plus envisageable.

       Il regarda autour de lui quelques instants, ses officiers étaient tous très concentrés. Da Silva passa pas mal de temps sur le même canal communication que Miller.

       –Amiral, Aegis, prêt à ouvrir le feu ! S’exclama le lieutenant Dogett.

Le moment que tous attendaient était enfin là, au bout de cinq longues minutes. Aégis allait leur permettre de terrasser leurs adversaires et de pouvoir enfin souffler. Le combat était tellement intense que les nerfs avaient étés mis à rude épreuve. Da Silva leva les yeux vers Nathan, se tenant face à lui, de l’autre côté de la table tactique :

       –Ils sont entrain de manœuvrer long, ils désengagent le combat.

       –Ca y est, ils fuient. Dogett ! Ouvrez le feu, ciblez croiseurs lourds en priorité ! Hurla-t-il.

       L’impressionnant tir lumineux sorti du canon Aegis, et de sa poigne et de son talent. Dogett dirigea le tir droit sur sa première cible. Les sidoniens comprirent, les deux croiseurs commencèrent à s’éloigner l’un de l’autre dans l’espoir que le tir perde en efficacité sur la distance. L’un deux, le plus proche, se sentant condamné entama un bond spatial et commença à s’engouffrer dedans. Le feu d’aégis fit une courbe pour partir sur le fuyard à toute vitesse. Le tir le transperça latéralement et ressortit aussi vite de l’autre côté. Le vaisseau ennemi explosa, son arrière train plongeant vers le bas. Le bond se stoppa net et seul l’avant du bâtiment se trouva ailleurs dans l’univers. Le feu d’Aegis ne perdit guère de sa fureur destructrice et continua son tracé à toute vitesse sur la deuxième cible, l’escorteur. Cette fois, Dogett visa la tour de contrôle, le tir traversa la base de la tour, le choc puis l’explosion qui s’en suivit sur bâbord le fit bouger sur ce flanc. Les moteurs et ses lumières s’éteignirent. Il était aussi en train de sombrer et son équipage, de suffoquer.

       Le dernier croiseur était plus loin mais le feu d’aégis était encore loin de s’épuiser, le vaisseau sidonien, prit de vitesse par le tir entama une tentative de saut spatial. Mais le tir le frappa à l’arrière de ses moteurs qui explosèrent aussitôt puis se propagea au fur à et mesure que le tir transperça tout le vaisseau de l’intérieur. Le lieutenant Dogett continua à diriger le tir avec ferveur jusqu’au dernier escorteur, suffisamment éloigné, ayant fui depuis un moment le combat. Il ne pouvait certainement pas pouvoir sauter. Le tir commençait à s’affaiblir, ayant traversé beaucoup de matières précédemment mais il continua sa route. L’escorteur mettait plein gaz pour éviter le plus possible la frappe de tir faiblissant sur la distance. Finalement c’était un tir faiblard qui arriva à son arrière et qui fracassa ses moteurs, le rendant obsolète. L’escorteur avança lentement à la force d’inertie. Dogett relâcha la gâchette, soufflant, exténué d’une concentration extrême.

       C’était quelque chose de spectaculaire à voir à travers les vitres de la tour. Ce feu blanc lumineux dirigé à une vitesse impressionnante détruire en l’espace de quelques secondes une flottille ennemie. Le calme était revenu, on entendit plus que les morceaux de carcasses pleuvoir sur les vitres blindées. On entendit plus les fracas de tirs ennemis, il n’y avait plus de secousses, il n’y avait plus la luminosité des explosions. Seulement un sillage de fumée venant des incendies brulant l’oxygène de bord. Les chasseurs ennemis avaient battu en retraite. Ils avaient trop perdu pour faire tomber les deux mastodontes de la septième.

Nathan leva les yeux à l’écran visiophone, déterminé, il dit :

       -Commandant Powell, plein gaz sur la dernière cible. Lieutenant Luciano, rapport d’avaries. Dogett, état des armes, soyez prêt à tirer. Oswald, où en sont les deux croiseurs ?

       –Amiral, on ne peut pas se permettre l’arrivée de nouveaux renforts ennemis. Nous devrions partir. J’ai subi de lourds dégâts, lui rétorqua Powell.

       –Non, nous nous devons d’en finir, lui répondit Nash.

       –Armes prêtes à tirer, tourelle principale en joue, amiral, répondit Dogett.

       –Les deux croiseurs ennemis bientôt à porter de saut amiral, repris Oswald.

       –Monsieur, graves avaries sur les ponts B et C. Saturation du système de refroidissement sur l’Andrasta, lui informa aussi Da Silva.

Ignorant quelques peu les dangers prévisibles, Nathan réitéra son ordre.

       –Powell, Hansen, direction dernier escorteur ennemi. Angle d’élévation trente-cinq degrés, à tribord toute. 

Le Bellérophon et l’Andrasta mirent plein gaz sur la dernière cible, cette dernière étant lente. Peu à peu, la septième se trouvait derrière le dernier vaisseau survivant. Les vaisseaux lancèrent des torpilles, grâce aux tubes de lancement avant. Chaque seconde une torpille partait, l’une après l’autre, de gauche à droite. L’escorteur sidonien n’avait pas dit son dernier mot. Il détruit des torpilles, ses batteries de défense anti-aérienne de poupe n’avaient pas rendus l’âme. Les canons photons centraux tirèrent aussi, droit devant sur l’escorteur. Les sidoniens se défendaient en tirant de manière hasardeuse sur l’Andrasta. L’escorteur sidonien encaissa les coups, puis un autre et encore un de plus, leurs batteries souffraient. Puis les torpilles n’avaient plus d’obstacles de défense et leurs moteurs explosèrent. Ensuite, le feu dévora le bâtiment de l’intérieur depuis la proue jusqu’au nez qui se mit à piquer vers le bas. La cible avait été détruite sans pitié dans une agonie d’espoir de survivre à ses prédateurs.

       Oswald reprit la parole pour informer Nathan :

       –Monsieur ! Les deux croiseurs sidoniens sont en train de sauter dans l’espace de combat.

       –Miller ? Demanda Da Silva au chef d’escadrille.

       –Tous les coucous sont au bercail lieutenant.

       –Bien, faites le bond, ordonna Nash.

       –Négatif ! Bond spatial impossible. Nous avons une avarie dans notre système de refroidissement. Si on force le saut, on finira sur le grill amiral ! Informa l’officier communication de l’Andrasta.

       –Bien, réarmez les coucous, redéployez l’escadrille. On reste, ordonna Nash à Da Silva.

Le second fixa l’amiral :

       –Nathan, tu n’y penses pas ? Ils devraient forcer le saut et tenter.

       –Lieutenant, obéissez !

       –Monsieur, le système de refroidissement est à sa capacité d’usage maximum. Quand la fuite sera colmatée, le système de saut sera opérationnel, ajouta Powell.

       –Amiral ! On ne supportera pas un autre combat ! lui dit Da Silva.

       –Lieutenant, il est hors de question que nous abandonnions un autre vaisseau. Nous allons nous battre et tenir

Soudainement, Da Silva jeta brutalement à terre son oreillette, ne confirmant pas les ordres nécessaires aux mécaniciens du pont du hangar pour recharger les escadrilles ainsi qu’a Miller pour redécoller. Tout le monde la fixa désormais, elle venait de défier l’autorité de Nash :

       –Monsieur nous ne pouvons survivre à ce combat, Aegis sera trop long à refroidir.

       –Lieutenant je vous ai donné un ordre. Nous n’abandonnerons pas l’Andrasta, reprenez votre oreillette et ordonner le départ des escadrilles.

Elle était complètement figée par l’audace de Nathan. Elle reprit son oreillette, puis donna l’ordre. Powell fit déjà voler ses oiseaux et il pressa ses techniciens de colmater la fuite.

       Agacé, Nathan activa l’intercom flotte. Il fixa tous les officiers de sa passerelle dans les yeux :

       –Ecoutez-moi bien, tous. Nous avons choisi notre destin, de nous battre jusqu’à ce que la mort nous emporte à partir du jour où nous avons su pour cette guerre. Leur nombre, leur puissance, qui sont-ils réellement. Nous n’en savons rien, nous n’avons jamais vraiment trop su d’eux. Le haut conseil n’en savait rien, le gouvernement fédéral cessa toute activité d’espionnage. Mais peu importe, beaucoup de gens que l’on a aimé sont morts. Si nous, nous devions mourir, je préfère que ce soit en m’ayant battu plutôt que végéter dans une cellule.

       Tous les membres d’équipages se regardèrent les uns et autres. Il ne leur fallut que quelques secondes pour se rappeler que, le temps à errer dans l’espace était compté, autant le rendre utile. Qu’ils pouvaient oublier l’amnistie après avoir détruit la flotte du missionnaire diplomatique sidonien. Qu’ils avaient détruit leurs vies d’avant sur leurs mondes, et que plus jamais ils ne la retrouveraient.

       Ses troupes se remotivèrent et des petits miracles se produisirent dans la flotte. La motivation engendrée par Nathan se répandit comme une trainée de poudre. Le courage envahit à nouveau ses hommes et la peur de la mort s’éloigna. Un mélange d’adrénaline, d’effort, d’intelligence et de travail en équipe se mire en œuvre ici et là, par les petites mains. Sur la passerelle, cela se traduisit par des remontées de rapports positifs aux problèmes ainsi que de voyants rouges qui passèrent au vert.

       Da Silva, quelque peu dépitée d’avoir céder à la paniquer, releva la tête pour se concentrer.

       –Nous allons les affronter, reprit Nathan.

A bord de l’Andrasta, il lui était toujours impossible de faire un saut. Les escadrilles reprirent leurs envols, de nouveaux armés, fatigués, mais motivés.

       –Amiral, croiseurs sidoniens en approche, déclara Oswald.

Nathan souri à Da Silva, ne la quittant pas du regard et lui dit :

       –Qu’importe l’issu de ce combat, il ne faut pas craindre la mort.

Confiante, elle lui rendit son sourire. Ils n’avaient plus peur, malgré le pessimisme de la situation. C’était de cette manière apaisé que la septième allait affronter son ennemi.

       Les deux croiseurs ennemis tout neufs venaient à peine de sortir de leurs portails de saut qu’ils purent apercevoir la situation. Leurs compagnons avaient étés décimés sans pitié. Les deux croiseurs de guerre responsables, souffrant de leurs blessures de guerre, leurs foncèrent droit dessus tels des fous.

       L’Andrasta se mit en ligne derrière le Bellérophon, les sidoniens se mirent également en ligne. Ils avancèrent l’un face à l’autre, dans un double duel. Les sidoniens et les humains ouvrèrent le feu et un déluge de violence commença à nouveau. Un orchestre lumineux d’échanges destructeurs se mit en œuvre. Les salves de canons latéraux, de tourelles centrales, des batteries, tous s’en donner à cœur joie.

Les dégâts passés se firent ressentir, tous les vaisseaux faisaient demi-tour pour un second combat loyal en ligne. La flotte humaine tenait grâce à l’énergie et à l’effort de guerre des hommes. Il devint évident pour Nathan de comprendre que les sidoniens s’appuyèrent sur la technologie, contrairement aux hommes qui s’appuyer sur leurs courages.

       Le deuxième combat en ligne arriva, ils s’échangèrent leurs politesses à nouveau. Les vaisseaux humains tremblaient sous les tirs ennemis. Les mêmes problèmes techniques se déclenchèrent à nouveau à bord, gênant les manœuvres d’armes, de défense et de mobilité.

       Quand soudain un chasseur ennemi parvint à traverser le rideau de feu défensif du Bellérophon. Miller ordonna immédiatement sa chasse et il fut aussitôt poursuivi par les pilotes. Il n’allait pas tenir longtemps sous le feu de trois chasseurs, même touché et en flammes. Il réussit à s’avancer suffisamment près pour tirer une salve de missile en direction de l’embase de la tourelle photon, face à la tour de contrôle. Endommagé par Miller, ce chasseur ennemi se cracha à même le flanc du Bellérophon. La tourelle touché par les torpilles explosa, un des trois tubes du canon flotta, arrivant en direction de la passerelle. L’équipage de passerelle du Bellérophon retint son souffle, voyant arrivé le tube droit sur eux.

       –Fermez les rideaux blindés ! s’écria Da Silva.

Hansen activa le rideau blindé et ralenti les moteurs après cet échange de tirs très vifs. Mais ils se refermèrent trop lentement et le tube tapa violement une des vitres la fissurant, secouant l’équipage de la passerelle.

       –Mais bordel, que fais Miller ? S’exclama Nathan.

       –Désolé, ils sont trop nombreux, on a du mal à les contenir, Miller, terminé.

Le Bellérophon venait de perdre une de ces cinq tourelles photons. Le bond n’était toujours pas rétabli sur l’Andrasta.

       Nathan savait qu’ils ne tiendraient pas encore longtemps. Il regretta sa décision couteuse d’avoir chassé un escorteur fuyard qui neutralisa la capacité de saut de l’Andrasta. Il savait que la situation commençait à être compliquer. Il était heureux d’avoir combattu ces assassins de masse, mais triste que le combat s’arrêterait probablement là.

       –Préparez-vous au troisième contact, hurla Oswald.

Serein, Nathan mis ses mains derrière le dos et resta les yeux fixés sur l’écran. Il prit son oreillette et exigea le départ d’un vulture pour sauter vers l’Eureka. Pour qu’ils se rendent, certificat numérique à l’appui que l’Eureka n’a fait qu’obéir à l’officier référent de la flotte. Espérant ne pas envoyer tout le monde à la mort. Le vulture partit aussitôt avec ses instructions vers les coordonnées de sureté de l’Eureka Nine.

       Pendant ce temps la septième fit demi-tour et se prépara au troisième échange de tirs. Les deux flottilles adverses avancèrent l’une vers l’autre. La troisième serait très dure, l’infériorité numérique des escadrilles, l’usure des hommes. Le système de refroidissement d’Andrasta toujours en difficulté. Ils restèrent courageusement l’un face à l’autre, les salves de tirs s’échangèrent encore.

       Une offensive de chasse ennemie passa encore les défenses, toujours plus faibles de la septième. Nathan le vit arriver mais ne donna pas d’ordres puisque cela était inutile, ses chasseurs étaient déjà débordés. Il aurait pu éviter l’intrusion mais l’ennemi aurait trouvé une autre faille, ils avaient l’avantage. Alors il observa ce qu’il allait faire et il comprit. Les trois chasseurs ennemis, ayant désormais le champ quasi-libre envoyèrent des missiles à l’intérieur du pont d’envol en direction de la passerelle du pont. Ils détruisirent cette dernière et tuant l’officier à qui il venait de parler afin d’envoyer un vulture à l’Eureka. L’un d’entre d’eux fut abattu par une tourelle défensive avant de pouvoir ressortir et termina sa course folle sur un des murs du pont.

       L’explosion dans le ventre de la bête se fit ressentir, Nash resta stoïque. Les officiers de la tour en étaient accablés, commençant à stresser, même si la calme visible de l’amiral les rassura. Cependant, l’amiral savait aussi bien qu’eux lire les indicateurs de défaite, mais il n’avait pas peur de la mort puisqu’il l’attendait.

       Le troisième échange venait de se terminer. En tant que cible préférée des sidoniens, le Bellérophon venait de souffrir en si peu de temps. Ce vaisseau concentre toujours l’effort de guerre ennemi, craignant l’Aegis.

       Dogett ne parvint pas à faire la différence lors de ce combat et mettre hors service un vaisseau ennemi. Il lui était plus aisé les échanges de tirs fatals de loin, moins prévisible.

       Peu importe car c’était un combat à mort. Le pont d’envol fuma noir, ainsi que l’avant du vaisseau aux niveaux de la tourelle perdue. Les incendies compliquèrent la vie de l’équipage et les officiers étaient débordés. L’Andrasta n’était pas autant ciblé mais ses dégâts de guerre ne le permirent pas d’améliorer sa situation car il avait à peine de quoi pouvoir maintenir sa position.

       Les quatre vaisseaux firent demi-tour pour s’affronter encore en double duel. Cette fois-ci pour Nathan c’était le coup de grâce qui immobilisera un vaisseau de la septième flotte à coup sûr. Il commença à compter les secondes et à contempler la manœuvre inéluctable les menant droit vers une lente agonie. Cette ultime face à face sera le dernier de la septième.

Quand soudain, Oswald s’écria :

       –Amiral ! Portail de saut en cours sur zone de combat. Signature énergétique inconnue.

       –Vous ne l’avez dont pas vu sur le radar longue portée ? Demanda Da Silva.

       –Négatif, répondit-il.

       –Ils sont en train de sauter en plein milieu du combat, reprit-il

       –Ils vont bloquer le prochain échange de tir, s’étonna l’amiral.

Les humains et les sidoniens savaient cela inutile de se tirer dessus, avec un bond spatial entre deux feux. Ils se contentèrent de garder la distance dans ce face à face prévu durant lequel un vaisseau inconnu était en train de montrer le bout de son nez.

       Il n’en fallut pas plus pour que les sidoniens ciblent aussitôt le nouvel arrivant inconnu. Les ennemis de ses ennemis étant ses amis. Nash ordonna expressivement de reprendre le feu sans prendre le risque de toucher le vaisseau inconnu lors de ce quatrième échange. Echange qui s’acheva sans fracas pour les hommes grâce à l’arrivée d’un nouveau belligérant.

       Le vaisseau inconnu finit de franchir son portail, et était en plein milieu du champ de bataille à encaisser des coups sidoniens. Nathan l’avait déjà visuellement reconnu à travers les vitres de la tour de contrôle, c’était le Lazare.

       Toute la septième était estomaquée de le voir arrivé. Une fois présent sur le champ de bataille. Le Lazare fit un grand virage et commença à chasser plein gaz tel un kamikaze sur les deux croiseurs sidoniens qui ne firent pas demi-tour pour le cinquième échange.

       Le Lazare ouvrit les hostilités sur les sidoniens. Ces derniers étaient en train de répliquer. Un vif échange de tirs entre les trois vaisseaux fut visible depuis la passerelle du Bellérophon.

       Lazare ne freinât pas sa vitesse et fonça toujours droit sur un croiseur ennemi. L’impressionnant par sa détermination, Nathan ordonna un tir d’appui sur les sidoniens pour aider son sauveur. Ces derniers se mirent latéralement face à la flotte pour tirer avec plus de précision en ciblant toujours Lazare.

       Les alliés de guerre continuèrent toujours leurs avancés avec en tête le Lazare qui encaissa tous les coups sans broncher, sans chercher à manœuvrer autrement. Il fonça droit sur le vaisseau à sa gauche, la septième continuant à cibler l’autre bâtiment sidonien à droite.

       –Mais ils sont complètement fous, ils vont les percuter ! dit Da Silva.

       –Je pense bien, répondit Nash.

       Le vaisseau pirate poursuivit toujours sa course sans subir de dégâts tandis que ces tirs de suppression faisaient souffrir son adversaire. Sans diminuer sa vitesse, il continua droit sur sa première cible. L’impact était imminent.

       Le Lazare, toujours plein gaz percuta violement le croiseur sidonien en son milieu, où se tint sa tour. Cela déclencha une première explosion qui happa le croiseur sidonien en deux. Sa structure métallique se déchira face à la proue du Lazare qui le traversa aisément. Les deux moitiés de vaisseaux sombrèrent chacune d’un côté.

       Puis, le vaisseau pirate se mit à virer sur tribord, soutenu par la septième. Le dernier vaisseau ennemi continua à faire barrage mais le Lazare le percuta aussitôt de flanc contre flanc, fracassant de la tôle sidonienne.

       –Ils sont fous ? Se demanda Powell.

Bellérophon et Andrasta continuèrent à tirer inlassablement sur la cible puis suivirent le Lazare. Ce dernier n’avait subi que peu de dommages par rapport aux sidoniens. Sa coque sembla beaucoup plus résistante. Les vaisseaux alliés se suivirent alors en tournant autour de la cible. Cette dernière mis les gaz mais les trois bâtiments de guerre ajustèrent leurs trajectoires, continuant d’harceler leur cible suffoquant sous les tirs. Le cours du combat avait radicalement changé et depuis la passerelle on voyait les explosions des multiples tirs endommager le croiseur ennemi. Il dut souffrir de graves avaries puis ses réponses devinrent de plus en plus faibles. Sans défenses, il fut transpercé de toute part.    

       Finalement, agonisant, il finit par sombrer, son nez plongea par le bas, sa tentative de portail de saut n’avait pu aboutir. Les flammes l’envahirent de toutes parts et le feu s’échappa de ses béantes entailles de guerre. Les trois vaisseaux ne relâchèrent pas le feu sur l’ennemi mourant. Le vaisseau ennemi avait perdu sa bataille, il ne pouvait plus tirer, ni se défendre. Il commença à exploser de parts et d’autres et son éclairage s’éteignit, ses moteurs aussi. Sa signature énergétique disparu des écrans radars, il était condamné et détruit. La carcasse n’avait plus de stabilisateurs et flotta dans l’espace.

       Un élan victorieux envahit les équipages du Bellérophon et de l’Andrasta, ses hommes et femmes affranchis s’applaudirent mutuellement. Le Lazare fit une demande à l’oreillette de Nash :

       –Demande communication privé du Lazare pour vous, amiral, reprit Da Silva.

       –Passez-les-moi, lieutenant. répondit-il.

Elle glissa alors son doigt sur la table tactique tactile les séparant et accepta la demande.

       –Amiral Nathaniel Nash, commandant de la septième flotte expéditionnaire, et du vaisseau de guerre fédéral Bellérophon.

       –Capitaine Pallas, capitaine du Lazare. Nash, je vous en devais une je crois. Ma dette est payée maintenant.

       –Capitaine, quelle dette?

       –Vous savez très bien de quoi je parle Nash. Nous nous sommes croisés il y a plus d’un an maintenant. Et en cette période-là, la flotte fédérale nous tirait dessus sans sommation, surtout pour protéger leurs ex-alliés de Sidonie. Vous aussi, vous aviez tiré, mais vous n’aviez pas continué ce combat comme vous l’auriez dû. On le sait très bien tous les deux.

       Nathan était bouche-bée, le capitaine du vaisseau pirate avait pris conscience que ce n’était pas la lâcheté de combattre qui l’avait poussé à abandonner la poursuite.

       –Vous n’en valiez pas la peine, capitaine.

       –J’aurai pourtant pu être un excellent trophée pour votre carrière, amiral.

       –Cela fait longtemps que je ne cours plus après une carrière. Mon intuition m’a conseillé de vous laisser partir. Voilà qu’aujourd’hui vous réapparaissez de nulle part et que vous nous sortez d’une situation compliquée.

       –Je ne répondrai pas à vos questions. Mais sachez que nous nous reverrons assez vite Nash.

       –Où et quand ? Demanda Nathan.

       –Quand le cœur vous en dira, à l’endroit pour lequel vous avez été guidé, amiral.

       –Quel endroit ?! reprit Nash.

       –C’est un endroit dans lequel les êtres qui ont perdu espoir se rendent Nathan, communication terminé, conclu le capitaine.

Pallas coupa la communication et son vaisseau entama son ténébreux bon spatial. Nathan fut surpris, il fit alors le lien avec les propos de la ministre.

       –On s’en va, nous aussi, reprit Nathan.

       –Andrasta, prêt à sauter, amiral, répondit Powell.

       La septième flotte sauta pour rejoindra l’Eureka Nine de Logan. Elle se mit au repos et les maîtres d’œuvres se mirent au travail. Les machines et les techniciens firent un vacarme d’enfer dans les coursives du vaisseau. Dès le lendemain, les chefs de la flotte en profitèrent pour se réunir afin de faire un bilan.

       Il était question d’évaluer le lourd tribut de la précédente bataille. Nash, Powell, Logan, leurs officiers en second, chefs d’escadrilles, ingénieurs, tous étaient présents dans les quartiers de l’amiral. Miller entama la réunion :

       –Nous avons pratiquement la moitié de nos chasseurs de combats hors service. Qu’ils soient du Bellérophon ou de l’Andrasta. Presque un cinquième de nos pilotes sont morts au combat.

       –Le restant est irréparable, reprit l’ingénieur du pont d’envol. L’atelier n’a presque plus de stock de pièces détachés amiral, nous ne pouvons réparer tous les chasseurs, les autres sont trop endommagées.

       –Nous avons de graves avaries sur les ponts intermédiaires du Bellérophon, le vaisseau a perdu énormément en capacité offensive, une tourelle photon est définitivement hors d’usage, poursuivi Da Silva.

       –Ce n’est pas tout, nous avons aussi des batteries anti-aériennes hors services, reprit Miller.

       –Nous n’avons plus de pièces de rechanges, même si nous avons équitablement réparti le stock entre les deux vaisseaux, dit l’ingénieur.

       –La tour du pont d’envol est entièrement détruite. Cela complique énormément les manœuvres, surtout visuelles et les flux aériens. Surtout que les personnes compétentes à ces postes sont quasiment toutes mortes. Cela va être compliqué d’y mettre de nouvelles personnes, reprit Da Silva.

       –L’Eureka ne participe jamais aux combats. J’ai beaucoup de personnes à bord dédiées au forage qui ne font qu’attendre la fin des combats, je pourrai vous en affecter. D’ailleurs en il ne reste que vingt-cinq pourcent des réserves de carburant, ajouta le commandant Logan.

       –On ne pourra pas continuer comme ça longtemps amiral. Les techniciens réparent les coques et nous avons bientôt plus assez de tôles. Ce sera bon pour cette fois, mais ça ne sera plus possible de réparer au prochain combat. D’autant plus que le rafistolage ne permet pas une solidité aussi accrue qu’en cale sèche, informa l’ingénieur.

       –Nous avons un peu de temps. Ralentissez la cadence, on reste hors combat pendant quelques semaines.

       –Nous n’avons pas énormément de temps. Les réserves de nourritures finiront par nous manquer. Nous avons à peine un peu plus que ce qu’il faut pour rentrer vers Terra Nova, s’interrogea Da Silva.

       –Il faut croire que cette fois, amiral, nous arrivons à terme de notre voyage. Soit nous mourrons dans l’espace faute de ressources, soit on meurt tous au combat. Je nous vois mal nous rendre après tout ce qu’on a fait. Mais nous ne savons toujours rien sur la situation de nos mondes. Beaucoup de personnes dans mon équipage ont encore espoir de croire que leurs proches n’ont peut-être pas été touchés. Si nous continuons ainsi, je crains la mutinerie, expliqua Powell.

       –Je sais, répondit Nathan. Nous ne pourrons pas continuer ainsi et j’ai déjà perdu assez de monde comme ça.

       –Vous voulez que l’on se rende ? Je ne pense pas qu’une reddition soit acceptée, notre attitude rebelle nous as condamnés, dit Miller.

       –C’est la mort qui nous attend si nous continuons ! Répond sèchement Da Silva.

       –Nous avons un nouvel allié maintenant, répond-il sur le même ton.

       –Il est parti, et je doute qu’il nous aide plus que ça. Nous ignorons si nous pouvons gagner cette guerre et nous ignorons les forces ennemies en présence.

Nathan, regarda en l’air, puis il leva les yeux vers les siens et dit :

       –J’ai très bien écouté ce que vous avez tous dit. J’ai bien pris note de la situation dans toute sa complexité. Demain soir, je ferai une déclaration à la flotte. Maintenant, excepté Powell, sortez tous. 

       Tous obéirent aux ordres et sortirent. L’amiral et le commandant se retrouvèrent seuls. Nathan sortit une bouteille anglaise, ainsi que deux verres qu’il remplit :

       –Ca aussi c’est  une denrée qui commencera bientôt à se faire rare, je finirai par vous tuer pour en avoir une goutte d’ici peu, commandant. 

Nathan ri, puis il prit une gorgée et reposa son verre.

       –Je n’ai pas compris pourquoi tu ne l’a pas mise aux fers, elle a défié ton autorité, demanda Powell au sujet de Da Silva.

       –Elle a paniqué, elle a perdu son sang-froid d’autrefois. Je l’ai connue plus tête brulée plus jeune.

       –Elle va te poser des problèmes. Mais peu importe, c’est toi qui commande. Tu comptes dire quoi demain ?

       –Demain, mon ami, j’annoncerai un grand départ, loin.

       –Où ?

       –Dans un endroit où se rendent les êtres qui ont perdus espoir, comme ceux que je viens d’entendre parler juste là.

       –Mais de quoi parles-tu ? Il y a quoi là-bas ?

Nathan dut mentir, il ne savait pas ce que les coordonnées de Swan pouvaient cacher :      –Il y a des ressources cachés, dit-il. Ça se trouve au-delà de nos galaxies connues, nous pourrons ravitailler là-bas.

       –Si nous y allons, tu te doutes bien que nous prenons le risque de jamais pourvoir rentrer sur Terra Nova ? Qu’est-ce qui te dit que les sidoniens n’ont pas pris ce secteur. Ils doivent tout savoir sur nous. D’où tu tiens cette information secrète? Je veux bien tenir mon équipage pour les convaincre de te suivre. Mais il faut que tu me rassures, que tu n’es pas pété les plombs et que tu nous emmènes bien vers quelque chose.

       L’amiral fixa son commandant droit dans les yeux :

       –James, nous n’allons pas aller là-bas pour mourir. Je te rassure, les sidoniens ignorent l’existence de cet endroit. Comme tout le personnel du haut conseil, je peux te le garantir.

       –Comment toi tu le sais ?

       –Quelqu’un qui hait les sidoniens m’a donné rencard là-bas.

       –Tu veux dire Pallas ? C’est dont de cela que vous avez discuté en privé ? Comment peux-tu lui faire confiance ?

       –Ecoute James, dans tout ce merdier. Il y a des personnes qui semblent savoir ce qu’elles font. Comme s’ils avaient su pour la guerre, pas nous. Tu ne trouves pas étrange que Z-BX-34 soit un échec, nous indiquant que les sidoniens avaient frappés un monde avant, la planète noire. Que le seul vaisseau de la flotte humaine capable de résister à l’ennemi se trouve loin de la guerre quand elle a éclaté. Loin du piège dans lequel tous nos confrères sont morts. Et que depuis tout ce temps, le Lazare leur faisait la guerre seule, qu’ils viennent juste de tous nous sauver, et de nous rencarder là-bas.

       Powell fut surpris de cette déclaration et appris des informations qu’il n’arrivait pas à relier entres-elles. Il lui fallait des résultats plus pragmatiques :

       –D’accord, mais concrètement, tu penses y trouver quoi dans cet endroit tenu secret ? De l’aide ? De la nourriture ? Du carburant ?

       –Je pense qu’on y trouvera ce que l’on cherche, fais-moi confiance.

       –J’espère que tu sais vraiment ce que tu fais. Sinon je crains le pire, car ce voyage semble être un allé simple.

       Powell finit son verre et sortit des quartiers de l’amiral. Nathan en profita pour sortir sa tablette et regarder une photo de sa famille, il ne les reverra plus jamais.

       Le lendemain, Nathan devait prendre son quart. Il se leva, se prépara et se rendit sur la passerelle. Une journée éprouvante qui suivit son cour car il suivit l’avancement des travaux de réparations des deux vaisseaux avec attention.  Le soir venu, il était grand temps de faire la déclaration qu’il avait promise à ses officiers. Sa promesse de dévoiler ses nouvelles ambitions s’était répandue comme une trainée de poudre dans la flotte.    L’équipage était nerveux d’être sans objectifs, sans ligne directrice à suivre. Au vu des indicateurs de ressources et de la dernière bataille, ils ne virent que la mort.

L’amiral regarda l’espace à travers les vitres de sa passerelle, dont une était désormais brisée. Il regarda son second, vacillante, il lui dit :

       –Lieutenant Da Silva, intercom flotte.

       –Tout de suite, amiral.

Aussitôt dit, la voix de l’amiral passa dans tous les hauts parleurs de la septième :

       –Ici votre amiral, J’ai une annonce importante à vous faire. Je vois bien le désespoir dans vos regards à tous. C’est en vous, dans ces mêmes regards, que j’ai puisé le courage de ne pas nous rendre à l’ennemi. Nous avions bien fait, la guerre n’est pas terminée, et nous ne l’avons pas perdue. Il est vrai que nous ne sommes pas au meilleur de notre forme et que nous sommes épuisés. On aimerait que cela cesse, mais des gens sur nos mondes, prient surement pour un miracle. Nous pouvons répondre à leurs prières. Nous allons nous rendre dans un endroit, tenu secret qui se trouve au-delà de nos galaxies. Il n’y aura pas de sidoniens. Il est vrai que le voyage parait juste au niveau de nos ressources. Ceci dit, c’est un voyage de la foi, il sera long, il sera usant. Mais si nous traversons cela tous ensemble.  Nous y trouverons tous ce que nous cherchons. Je vous le promets, votre amiral, terminé. Puis Nathan coupa son oreillette, il regarda Luciano :

       –Quand les travaux seront finis je prendrai le contrôle des commandes de sauts spatiaux de la flotte. Nous avons douze sauts à faire, avec des trajets allant de quelques heures à quelques jours pour être au meilleur endroit avant de refaire un saut. 

       Après douze longs jours de travaux de réparations, d’efforts pour certains, de repos pour d’autres. Nathan pu exécuter son premier bond. Il posa son doigt sur la table tactile, entra son code de confirmation. Il prit le contrôle des commandes de saut de la flotte comme lui avait demandé Swan.

       –Monsieur ? S’inquiéta Luciano.

       –Ne vous en faites pas lieutenant. Je sais où nous allons.

       En réalité il n’en savait rien, mais il espérait que la ministre et le pirate ne l’avait pas trompé. C’était un acte de foie douteux, son côté pragmatique le savait très bien. Il entrainera tous ses hommes d’équipage dans ce grand océan noir, dans l’inconnu le plus total. Bien au-delà de l’espace connu des humains. Il sortit de la poche de son uniforme, le fameux bout de papier frappé Naglfar donné par Swan. Il lit la première série de coordonnées de chiffres. Il commença à la taper, illisible aux écrans du saut de toute autres personnes que lui.

       A bord de l’Andrasta, Powell ferma les yeux et réfléchit. Il s’écarta de sa table tactique et avança jusqu’à ses vitres. Il les rouvrit et regarda à travers les vitres de sa passerelle la magnifique figure de proue du Bellérophon. Elle avait un peu souffert de la guerre mais elle restait toujours aussi belle.

       Il se dit que c’était de la folie. Il ignorait où l’amiral l’emmena, il avait menti à son équipage en disant que Nathan savait. Il devait réagir maintenant s’il le devait car il sera bientôt trop tard. Cependant il resta hypnotisé, un voyage de foi pensa-t-il. Après tout, Nathan avait menacé son second Da Silva pour ne pas abandonner son vaisseau à la guerre. Powell, reprit confiance en son amiral et retourna à sa table tactique :

       –Préparez-vous à sauter ! Dit-il sur sa passerelle.

       Nathan avait fini de taper ses coordonnées, commençant le premier saut. Toute la flotte plongea alors dans un premier saut vers l’inconnu. Tout s’était bien passé, ils étaient désormais en zone inconnue. Luciano et les cartographes de la flotte étaient complètement perdus. Nathan ne disait rien mais il n’en savait pas plus, il savait juste que ce bout de papier lui donna un chemin précis à suivre, aveuglément. Il devait garder le cap droit en avant jusqu’au prochain saut assez proche en vitesse de croisière.

       Deux heures après, la septième fit un second bond spatial. Deux jours après, l’amiral revint sur la passerelle pour exécuter le troisième saut. Une fois effectué, Nathan voulut repartir dans ses quartiers, quand soudain il fut interrompu par Oswald :

       –Amiral ! Je détecte quelque chose.

       –Quoi ? Il ne semble rien à y voir.

       –Rien de détectable à part ceci.

       –Qu’est-ce ?

       –Un débris fait de tôles et d’acier typiquement humain, surement une épave, amiral.

Cette découverte surpris Nathan car Swan voulut surement qu’il tombe dessus, il avait besoin de réponses :

       –Major Da Silva, envoyez deux vultures de reconnaissance, que le chef de pont attende mon arrivé avant départ.

Perdue et hésitante, elle le regarda longuement, Nathan reprit :

       –Major, félicitations, vous étiez là pour valider votre apprentissage en tant qu’officier en second, non ? Vous l’êtes désormais.

       –Vous embarquez personnellement, amiral ?

       –Je vais voir l’épave, major. S’il devait m’arriver quelque chose, vous savez que ma puce donnera mes clefs de commandement de la flotte à Powell, et du Bellérophon à vous. Ne vous inquiétez pas.

Nathan quitta la  passerelle pour se rendre sur le pont d’envol. Da Silva se retourna à son poste pour suivre les opérations.

       L’amiral salua l’équipe du pont d’envol, puis il embarqua dans un vulture amené jusqu’au monte-charge. Ce dernier monta les petits vaisseaux au sas de dépressurisation, jusqu’au pont d’envol. De là, ils décollèrent, cela faisait quelques temps que Nathan n’avait pas admiré son vaisseau de l’extérieur. Da Silva ordonna que quatre SS-16 sortirent en escorte :

       –Capitaine Miller en escorte, l’amiral est de sortie, terminé, chercha-t-il à rassurer.

       –Vulture F-154-43, en approche de l’objet non identifié, terminé.

       –Bien reçu lieutenant, soyez prudent, répondit la passerelle du Bellérophon.

Nathan finit d’enfiler sa combinaison d’environnement hostile et les deux vultures s’approchèrent de l’objet inconnu. Plus les deux petits vaisseaux s’avancèrent et plus il sembla évident qu’il s’agit d’une épave de vaisseau aux caractéristiques typiquement humaines. Nathan se demanda ce que ce vaisseau pouvait bien faire là, si loin des routes connues.

       –Lieutenant, demanda Nash au pilote. Allumez les projecteurs et dirigez-vous la poupe du vaisseau. 

Le projecteur révéla le code d’identité du vaisseau depuis sa coque :

       –Major, regardez si le code d’identification Q-G.EB/52 correspond à quelque chose dans les registres d’immatriculation de la flotte civile, ordonna Nathan.

       –Regardez mon amiral, le vaisseau semble être assez vieux. Il doit avoir au moins une cinquantaine d’années, ce type de moteur ne se fait plus depuis ce temps-là, s’exclama son pilote. Il avait raison, ce vaisseau marchand était vieux.

       –Je vois bien, lieutenant, répondit-il. Trouvez-moi une approche je veux qu’on apponte à bord.

Les deux vultures cherchèrent un pont d’envol ou un sas d’arrimage, mais ils ne trouvèrent rien. Excepté un trou béant dans sa coque, signe d’un amarrage sauvage digne d’un acte de piraterie du siècle passé.

       –Ici, ce sera parfait, dit l’amiral.

Les deux vultures s’introduisirent dans le trou du vaisseau inconnu. Ils se posèrent, et l’équipage en sortit. Ils montèrent les marches jusqu’aux sas pour entrer à bord du vaisseau marchand fantôme.

       –Les deux portes d’accès aux coursives sont verrouillées, il n’y plus de jus, dit une des femmes d’équipage.

       –Faites sauter, ordonna Nathan.

L’équipe posa alors un explosif léger et fit sauter la porte. Puis ils s’introduisaient dans les entrailles du vaisseau. Il y avait des traces de combats à l’intérieur et des cadavres encore congelés flottaient toujours piégés à bord. La tenue vestimentaire des cadavres, leurs armes, datées clairement de plusieurs dizaines d’années, confirmant la théorie du pilote. Nathan se demanda comment ils ont pu arriver là, il savait que c’était un indice de Swan. Il appuya sur la touche communication de sa combinaison.

       –Amiral Nash à passerelle. Des nouvelles de l’immatriculation ?

       –L’immatriculation n’est plus référencée, la base de données nous indique qu’elle a bel et bien existé mais qu’elle a été effacée. 

       –Vous avez le nom du vaisseau ?

       –Négatif monsieur.

       –Ok, cherchez encore, nous allons essayer de trouver le journal de bord.

       L’équipe poursuivit son avancée à travers les coursives lugubres du vaisseau. Ils étaient gênés par une multitude d’objets. Nathan poussa une grille de ventilation qui le gêna. Il était attiré par une porte verrouillée qui était devant lui. Il prit l’initiative de la déverrouiller seul, mais ses hommes lui donnèrent un coup de main et ils la poussèrent.

       La porte s’ouvrit, Nathan entra, ses hommes n’y voyant rien d’intéressant au premier coup d’œil, poursuivirent leurs recherches ailleurs.

       Il s’agit de la chambre d’une petite fille,  il y avait ses affaires qui flottèrent ici et là. Des livres sur les animaux, sur les plantes, il y avait des jeux d’adresses et des figurines. Il y avait un livre qui sortit du lot, Nathan vit un cygne dessiné main, recouvert de paillettes brillantes sur sa couverture. Nathan le fit délicatement entrer dans une boite de conditionnement pour examen. Il leva les yeux et vit derrière lui un poème sur le mur de la pièce, au-dessus de la couchette. Il le lut :

Lorsque tous les anges seront tombés,

Lorsque tout l’amour se sera consumé,

Lorsque l’amitié des hommes n’aura pu se relever,

L’air et les terres auront brulés.

L’eau sera empoisonnée.

Les animaux seront disculpés, et les plantes auront fanées.

Tout se sera dissipé.

Il ne restera qu’aux hommes qu’à s’entredéchirer.

A sa monnaie, de se réinventer, sans succès,

Ce n’est point avec ce papier que l’on créer ce qui fut consommé,

Consommé, ce qui le fit proliférer,

Mammon doit bien se moquer,

De ces hommes piégés dans cette illusion tant convoitée,

Les anges seront rapatriés,

Ainsi le couperet du jugement dernier viendra trancher.

Seuls survivront les rares démons,

Payant le tribut de leurs propres illusions.

Le mal pensant triompher,

Devra s’abreuver de ses propres péchés,

Ainsi, l’enfer s’abattra sur Terre.

N’ayant que faire de ces affaires,

La vie, dans sa miséricorde infinie,

Accordera, une nouvelle destinée,

A tout ceux qui sauront la respecter. 

       C’était un philosophe français du 21ème siècle d’un style pessimiste qui avait écrit cela. Nathan en eut des frissons de le lire, même s’il se demanda ce que cela pouvait bien faire là.

       Ces hommes, en exploration à bord venaient juste de trouver la passerelle du vaisseau fantôme. Nathan entra dans la pièce et vit le cadavre congelé encore flottant de cet homme.       Certainement le commandant de bord, il fut exécuté d’une balle dans la tête. Il vit aussi son second, cette femme au visage qui lui sembla si familier. Ainsi que toutes les autres personnes de cette passerelle, tous morts par balles. Il y avait des traces d’échanges de tirs partout.

       –Trouvez l’unité centrale, et on s’en va, ordonna Nathan.

L’équipe commença à chercher un peu partout en dessous des panneaux de contrôles. Près de l’unité centrale sur laquelle le couvercle avait justement été retiré.

       –Tous les disques durs ont étés enlevés monsieur, il n’y a plus rien, répondit l’un de ces hommes.

       Nathan le constata par lui-même mais il ne put pas s’empêcher d’être déçu malgré tout. Ses précieuses données lui auraient apporté des réponses à ses nombreuses questions. Il aurait aimé en apprendre plus sur ce vaisseau, comment il était arrivé là, ce qui a pu lui arriver. Il aurait pu comprendre le rapport avec sa destination et la ministre.

       –Essayons de voir si la cabine du capitaine pourrait nous en apprendre plus, tenta-t-il.

       L’équipe continua d’explorer le vaisseau, ils se trouvèrent face à la cabine du capitaine, elle était à côté de la chambre de petite fille. C’était une majestueuse cabine, ornée de boiseries. Voilà qui ne se fait plus, le parquet glacé s’affaissa comme pied dans neige sous l’effet des chaussures magnétiques. Sur le mur, il voyait une réclame encadrée de la compagnie « Galaxy Express ». Ce logo symbolisa des flèches entre la Terre et Terra Nova. Il était certain de penser que ce vaisseau était un vaisseau marchand du siècle passé, à l’âge d’or de l’expansion spatiale humaine.

       Il dut faire la navette entre la Terre et Terra Nova, qui avait besoin de technologies et de structures pendant que la Terre, avait essentiellement besoin de ressources agricoles.

       Il dut appartenir à une famille de riches marchands dans l’import-export avant de se faire certainement attaquer par des pirates, pour qui c’était aussi l’âge d’or.

       –Prenez des  documents, faites des photos et on s’en va, ordonna Nathan.

Nathan regagna l’un des deux vultures et attendit, silencieusement. Peu à peu les autres le rejoignirent. Puis les deux petits vaisseaux redécollèrent sous escorte du capitaine Miller et ils atterrissaient sur le pont d’envol du Bellérophon.

       Arrivés sur place, Nathan demanda au docteur Keller de ranger le journal dans le congélateur du vide spatial :

       –Vous m’analyserez ces documents. Je sais que vous aimez l’histoire, vous pourrez valider mon hypothèse et m’apprendre de nouvelles choses.

       Nathan retourna à la passerelle, le major Da Silva se décala face à lui :

       –Alors qu’avez-vous trouvé, amiral ? 

       Il regarda son second et répondu :

       –Pour l’instant, rien. Ce vaisseau s’était perdu sans doute après s’être fait attaquer par des pirates il y a presque cent ans, un vrai cimetière. Lieutenant Dogett, faites armer le tube à torpille bâbord, torpille type P-66.

       –Amiral?  Demanda étonnée Da Silva.

       –Feu. 

La torpille sortie du tube de lancement, laissant une trainée blanche derrière elle. Elle se dirigea droit vers l’épave du vaisseau inconnu. Elle atteignit sa cible en son milieu, il ne fallait pas compter sur ces réserves de carburants glacés pour une explosion spectaculaire. Heureusement, la torpille était assez puissante pour réduire le petit vaisseau marchand en éclat.

       –Cible détruite amiral, lui dit le lieutenant Dogett.

       –Bien, nous allons faire le quatrième saut. Prévenez la flotte, Major. 

Ainsi, sur ses ordres, la septième franchit son quatrième bond sur les douze qu’elle avait à faire avant d’atteindre sa destination finale. Plus les bonds passèrent, et plus l’espace était sombre, s’éloignant de plus en plus des étoiles.